A peine garé, le chauffeur de bus Halo’ de Matis, accueillait à bord des passagers en bleu marine : « Contrôle des sacs, veuillez les ouvrir s’il vous plaît ! » Une demande que les policiers vont reformuler de multiples fois ce mardi matin dès 6 heures, auprès de scolaires qui obtempèrent sans broncher. A 7h, une vingtaine de véhicules étaient contrôlés, et quasiment autant sont annoncés : « Nous allons battre tous nos records, habituellement c’est 25 bus, mais là nous sommes sur deux établissements, le collège K2 et le lycée Mamoudzou Nord », rapporte le commandant Favras.
Dans un des bus, deux jeunes sont contrôlés sans titre de transport, ils descendent, montrent leurs carnets de correspondance. Ce n’est plus du domaine des policiers, mais des agents du conseil départemental, en tant que titulaire du marché des transports scolaires : « C’est de la responsabilité du chauffeur de demander la carte, sans quoi, c’est une amende de 100 euros pas élèves pour lui. Le risque, c’est de véhiculer des jeunes qui ne seraient là que pour causer des problèmes ».
Bus caillassés à Tsararano, à quand une solution ?
Ils sont présents tous les jours devant le collège K2, pour contrôler le bon état des véhicules, les cartes grises, etc., « aujourd’hui, nous avons relevé des pneus lisses, et un pare-brise fendu ». C’est que les bus sont soumis à rude épreuve : vendredi dernier, du côté de Tsararano, ils ont été victimes de caillassages en règle de la part de jeunes, qui n’ont trouvé que ce moyen pour régler un différend, « c’était une guerre de villages avec ceux de Ouangani », nous explique l’agent du CD. Résultats, « des vitres latérales brisées sur trois des bus. »
Un phénomène devenu presque de société que l’on ne parvient pas à endiguer. Des travaux d’intérêt général en entretien des bus seraient sans doute à tenter pour les auteurs des faits.
Chez Matis, on est satisfait de ces opérations dont le résultat va au delà du ponctuel : « Depuis que nous menons ces contrôles conjoints, nous observons un réel impact psychologique avec un changement de mentalité chez les jeunes. Nous avons moins de problèmes d’incivilité ou de fraudes », témoigne Jonathan Morel, responsable d’exploitation chez Matis.
Un cutter tout neuf prêt à l’emploi
Si c’est une première sur cette zone, les contrôles sont réguliers en zone police, rapporte Siaka Anli Djoumoi, Responsable Qualité, Sécurité et Médiation chez Matis : « Une fois tous les 15 jours, mais nous souhaiterions que cela se fasse de la même manière en zone gendarmerie de concert avec nous, au regard de notre connaissance du terrain ».
Le commandant Favras se souvient des premiers contrôles, « on trouvait des tournevis, des bout de miroir, divers objets qui, détournés, pouvaient servir d’armes. Lors d’un contrôle devant Jumbo, nous avons découvert un couteau à longue lame, le jeune a été conduit au commissariat. »
Pendant que nous parlons, un jeune est descendu du bus, un cutter neuf encore emballé a été trouvé dans son sac. Son copain patiente et répond à nos questions. Non, ils n’ont pas cours d’arts plastiques ou de technologie qui pourrait justifier un tel instrument, ils sont en apprentissage à l’UFA, et devaient se rendre en stage à Sodifram, « on commençait à 6h ». Et il est 7h ! Il tente l’excuse du bus arrivé en retard, mais pas de chance, Jonathan Morel a une oreille qui traine, « des bus passent à 5h30 ! ». Le jeune est toujours en discussion avec la police, ne veut donner ni le numéro de téléphone de ses parents, ni leur adresse.
Un peu plus loin, des filles sortent du bus contrariées, « alors là, on est vraiment en retard à cause du contrôle, on va louper le 1er cours ! », bougonnent-elles. La sonnerie vient de retentir un peu avant 7h30, la place se vide, les policiers rêvent d’un café et réfléchissent déjà au prochain contrôle.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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