C’est une filière parfaitement structurée qui est tombée ce mercredi au tribunal de Mamoudzou à l’issue d’une lourde instruction.
Fin novembre, un premier procès avait dû être renvoyé suite à une série de couacs. Elle a cette fois été jugée, dans un procès qui a duré plus de quatre heures.
L’affaire avait débuté par un écho radar. La PAF, alertée, allait prendre la mer quand les agents ont repéré un homme au téléphone qui se cachait dans sa voiture. Rapidement, le kwassa a fait demi tour. A leur retour, les policiers ont contrôlé l’individu, et son téléphone a permis de remonter à toute une filière d’immigration clandestine, chapeautée depuis Anjouan. En fait, deux filières gravitant l’une autour de l’autre, et mettant leurs ressources en commun. A Anjouan, les passagers payaient à un certain Nourdine. Le grand chef, selon les déclarations des uns et des autres. Son frère, Baco, l’homme aux 24 lignes téléphoniques à son nom, faisait office de sous-officier à Mayotte. Dans leur sillage, des pilotes bien sur, payés 1000€ la traversée et habitués à rémunérer 300€ des adolescents pour se dénoncer à leur place en cas d’interpellation. L’un d’eux, passé entre les mailles du filet, serait même “une star” à Anjouan, pour ses nombreuses traversées sans interception.
Une fois les passagers débarqués, rien n’était laissé au hasard. Un complice récupérait les passagers sur la plage pour rapidement les évacuer vers la nationale. Là, un taxi mabawa les attendait pour les emmener sur un terrain à Koungou où les familles des clandestins les attendaient pour les ramener dans leurs villages respectifs. Tout ce beau monde se partageait ensuite le pactole selon un barème bien défini. Les bénéfices étaient ensuite partagés entre Nourdine, qui gardait 70%, et Baco, 30%. Soit une somme conséquente puisque les revenus de ce réseau devaient atteindre le demi-million d’euros. Les voyages de Baco notamment au Qatar témoignent de son train de vie.
L’enquête a donc révélé des éléments précis, et une structuration élaborée. Ce qui n’a pas empêché les différents prévenus de tenter de brouiller les pistes à la barre. “Disons clairement les choses, leur a conseillé le président Banizette, puisque vous vous êtes déjà tous balancés les uns les autres devant les policiers.”
Face à cette “bande organisée”, le procureur Camille Miansoni a salué “la qualité de l’instruction et la sérénité des débats”. Face à cette affaire de kwassas “emblématique des problèmes sérieux que rencontre Mayotte”, il a ciblé ces “individus qui en font une activité professionnelle”. Dans cette bande, “chacun a un rôle indispensable, et ça fonctionne à plein régime. A raison de 6 à 8 traversées par semaine, c’est massif.”
Retour à Majicavo
Le procureur a dénoncé un système “bicéphale”, avec une tête à Anjouan et une à Mayotte. Il a décrit un “système satellitaire” où les pilotes sont “de vraies stars avec un vrai savoir-faire et qui rapportent gros”. “C’est essentiel que ces activités extrêmement graves soient condamnés à leur juste valeur, a-t-il plaidé, rappelant les quelque 20 000 morts entre Anjouan et Mayotte, chiffre tiré d’un rapport sénatorial.
Tenant compte d’une “hiérarchie des rôles”, il a requis 5 ans contre le chef, Baco, trois ans contre un lieutenant supposé, deux ans contre les pilotes et 18 mois contre les guetteurs et chauffeurs. Avec mandat de dépôt pour tous ceux dont la peine n’était pas déjà effectuée lors de leurs détentions provisoires. Et mandat d’arrêt contre les deux actuellement à Anjouan.
La défense a tenté de prouver que les têtes du réseau n’étaient pas à Mayotte mais à Anjouan, sans grand succès.
Si quelques passeurs présumés ont échappé à l’enquête, grâce à des surnoms notamment, tous les prévenus ont été lourdement condamnés.
Baco d’abord. Le tribunal a jugé qu’il était bien “le chef”, même s’il a tenté de se dédouaner derrière son frangin. Ses déclarations en audition, où il affirmait avoir le droit de “corriger” les autres membres de l’organisation, l’ont perdu. Il prend 4 ans ferme. L’homme qui a déjà fait 19 mois de détention provisoire, est parti finir sa peine à Majicavo.
Les pilotes et le lieutenant présumé ont tous écopé de 20 mois de détention ferme, et les guetteurs, de 12 mois. Pour tous, la détention provisoire recouvre la peine prononcée. Ils sont donc repartis libres. En revanche, tous font l’objet d’une interdiction de territoire français de 3ans.
Y.D.
Quatre ans ferme pour le chef d'un réseau de kwassas
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