« Il est paraplégique, annonce Jocelyne Forain, la belle-mère de Ben Nazek, les 4ème et 5ème vertèbres sont fracturées, et avec une compression de la moelle épinière, il n’a plus de sensation dans le bas du corps et sur son côté gauche ». C’est le Collectif des Citoyens de Mayotte qui a souhaité cette rencontre, et qui a contacté les médias.
Le jeune Ben Nazek avait emprunté un scooter à des copains, et s’est fait agresser mardi 23 janvier entre 18 et 19h par une bande de jeunes. « Il l’ont fait tomber de scooter et lui ont arraché son casque avant de le passer à tabac. Avec notamment des coups de pieds sur l’ensemble du corps, le laissant inanimé », nous expliquait dimanche la gendarmerie. Qu’il soit originaire d’Iloni et que ses bourreaux soient de Hajangua n’a pas vraiment d’importance, un règlement de compte entre village ayant l’air de minimiser la barbarie des actes. Il aurait également reçu un coup de chombo au visage. Il est actuellement en soin à La Réunion où son papa l’a rejoint.
Il effectuait une formation en alternance dans un restaurant de la zone Nel où travaille sa belle-mère, mais sa vie aura basculé à 16 ans et demi. Son copain qui était avec lui sur le scooter aura eu plus de chance, en plongeant dans une voiture de passage. Interrogé, il a pu livrer des noms aux gendarmes.
Menace d’exclusion de la communauté villageoise
Des violences, il y en a eu d’autres puisqu’un jeune de Tsoundzou a été évassané le même jour, après avoir été agressé entre Dembéni et Tsararano. Puis samedi, c’est une commerçante de Labattoir qui a été agressée, vraisemblablement pour dérober sa caisse, à coups de couteau qui l’ont atteinte notamment à l’œil, « elle risque de le perdre » nous indique le procureur Camille Miansoni qui précise qu’elle va désormais pouvoir être entendue.
Des violences proches de la barbarie que dénonce une nouvelle fois le Collectif des citoyens de Mayotte. Qui propose deux pistes de solutions. La première s’adresse aux familles et a des allures de poupée russe. « Nous demandons que lorsque leur jeune quitte la maison, pour se rendre dans leur établissement scolaire ou ailleurs, les parents contrôlent le sac de leur enfant. Si la communauté villageoise s’aperçoit de manquements ou d’incidents, elle devra lui faire observer, mais s’il y a récidive, la famille sera exclue de cette communauté. Et les maires doivent veiller au bon fonctionnement du système », indique Silahi Foumo, membre actif du Collectif. Un dispositif qui va être effectif à Kahani, « et qui doit se généraliser sur l’ensemble de l’île ».
Accompagnement des victimes et leurs familles
L’autre volet s’adresse à l’Etat, des propositions déjà émises il y a un an : « Nous demandons que le préfet prenne un décret de mise en place d’un Comité départemental de suivi de violences d’actes terroristes. Les victimes et leurs familles doivent être psychologiquement accompagnées. Le papa du jeune Ben Nazek a dû débourser 370 euros pour se rendre à La Réunion et n’a pas de congé pour cela, et pareil pour sa belle-mère ».
La différence avec l’année dernière, c’est que Collectif des citoyens vigilants et révoltés de Mayotte (Civirevos) n’est plus tout seul à le demander, neuf associations* les ont rejoints. Ils parlent d’attentat, de plan concerté pour déstabiliser Mayotte, « quand nous inculquons à nos enfants le respect de l’autorité, et qu’on entend dans les villages que d’autres invitent les leurs à la bafouer. Que parmi les coupeurs de route, certains se vengent parce qu’on les a expulsé de nos terrains, comment vous appelez ça ?! En silence, pousse une guerre communautaire. Nous visons les anjouanais, il faut briser les tabous. Nos élus ont définitivement baissé les bras. S’ils veulent venir d’Anjouan, qu’ils s’intègrent ! »
Tout en dénonçant un « massacre », le Collectif appelle chacun à ne pas se venger, « c’est pour l’éviter qu’il faut proposer des solutions et qu’elles soient mises en place au plus vite. » Ils sont ensuite parti ce mardi matin pour obtenir l’adhésion du Grand Cadi à leurs propositions, et sa médiation sur les litiges d’occupations illégales.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
* Comité de défense des intérêts de Mayotte, les Assoiffés de Mayotte, la Confédératio syndicale des familles de Mayotte, les Femmes leader, le collectif « Non Kari Vendze », l’association des usagers de la route, les Mamans vigilantes, l’association des consommateurs, le collectif de résistance mahorais (Ré-Ma)
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