D’après le Comité du Tourisme (CDTM) 61.800 visiteurs sont arrivés à Mayotte en 2017, le 21% en plus par rapport à l’année précédente. Le tourisme affinitaire, c’est-à-dire de parents et amis venu voir des proches, augmente du 28% et représente désormais le 69% du marché. Le tourisme d’affaires progresse aussi de 14%, selon l’étude annuelle de l’INSEE sur le flux touristiques. Un pourcentage, ce dernier, qui comprend les gendarmes venus assurer la sécurité de l’île avec des rotations de trois mois, ainsi que les médecins remplaçants.
Là où le bât blesse le plus, c’est sur le tourisme de loisir. Évalué à 10.000 personnes en tout, il enregistre une hausse d’à peine 3% en un an.
Cela n’empêche, insiste le CDTM, ce chiffre record pulvérise le plafond de 50.000 touristes recensé régulièrement depuis huit ans d’années. « On était fatalistes », avoue Jamel Mekkaoui, le chef du Service régional de l’Insee qui a mené l’enquête. « Mais ces données montrent que l’année dernière a été particulière et elle est porteuse d’espoir pour le futur du tourisme dans le département ».
Plus de vols directs à partir de la métropole et de la Réunion, d’où viennent 96% des voyageurs, et des prix plus accessibles ont eu l’impact attendu, avec une augmentation de 14% de voyageurs en un an. « L’enclavement de Mayotte était un frein au développement touristique », rappelle Jamel Mekkaoui, « L’arrivée d’une ligne directe (en 2016) a instamment changé les choses. C’est assez extraordinaire d’observer un changement si rapide, cela montre bien qu’il y avait une attente ».
Des touristes qui dépensent peu
Avec des bénéfices de 36 millions d’euros, presque 5 en plus par rapport à 2016, le secteur confirme son importance pour le développement du territoire. Mais le travail reste à faire. Les données montrent que seulement 15% des touristes logent dans un établissement marchand tel un hôtel ou une chambre d’hôtes. D’après le directeur du CDTM, Michel Ahamed : “Cette analyse confirme qu’il y a des verrous pour le développement touristique : les transports et l’hébergement. Sur le plan des transports, les choses ont bougé. Nous devons maintenant attirer les investisseurs et développer le foncier. Avec plus de concurrence, on pourrait tirer les prix vers le bas tout en améliorant la qualité de l’accueil ». Pourtant, rien n’est pour l’instant prévu pour former sur place les salariés du secteur, en dehors des formations CAP, insuffisantes. Rien ne sera non plus mis en place pour améliorer les conditions des structures existantes, vu que le CDTM « n’intervient pas sur les activités privées ».
Autre problème, les visiteurs dépensent peu sur l’île. En moyenne, les budgets ne dépassent pas les 26€ par jour pour les touristes d’agrément et les 12€ pour les touristes affinitaires, les plus nombreux. Seuls les touristes d’affaires dépensent quelques 85€ par jour. Et si presque la totalité des visiteurs considère Mayotte comme un territoire de valeur, 7 touristes sur 10 jugent le rapport qualité/prix insuffisant. « Est-ce qu’ils ne dépensent pas d’argent parce qu’ils ont un faible pouvoir d’achat ou parce que ils ne trouvent pas de produits de qualité ? La question mérite de s’y pencher sérieusement, si on veut améliorer l’offre touristique », estime M. Mekkaoui. Cette problématique relèverait d’ailleurs des compétences des Offices de tourisme, comme les animations à destination des touristes ou le service d’information. Un organisme qui n’existe pas encore à Mayotte (deux sont en cours de création, sur Petite-Terre et dans le Centre) et qui dépend des intercommunalités.
Le poids de l’image
Du côté du CDTM, on souligne la fidélité des touristes : 60% des voyageurs non originaires de l’île ont déjà visité Mayotte. Un chiffre à mettre en perspective, alors que presque les trois quart des vacanciers viennent voir un proche. « Il faut essayer, à terme, de faire arriver aussi ceux qui ne connaissent pas Mayotte », des Français comme des étrangers. Difficile quand l’île n’est pas vraiment connue, au contraire de Maurice, par exemple, ou quand les crises qui secouent le territoire participent d’une image négative qui prend pied dans l’imaginaire collectif. « La crise aux Antilles a eu des conséquences sur deux ans », rappelle M. Mekkaoui, « nous ne verrons les effets de la crise de 2018 qu’à partir de juillet ». L’objectif à court terme du Comité est donc de rassurer les possibles touristes : « Si on sait qu’on ne va pas être en sécurité et qu’on ne pourra pas profiter de la liberté qu’on souhaite, on ira voir ailleurs ».
LN
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