CARNETS DE JUSTICE. Parents, élèves et instituteurs sont devant l’école maternelle. En ce 6 juillet, tout le monde a déjà la tête en vacances lorsqu’une mère bouscule un instituteur : « T’es pas chez toi. Retourne chez toi, sale blanc ! »
L’instituteur est certes d’origine métropolitaine mais il a grandi à Mayotte et y exerce son métier depuis plusieurs années. Choqué par des propos « inadmissibles dans une école et devant des enfants », il dépose plainte pour « injure publique envers un particulier en raison de sa race, de sa religion ou de son origine ». « Je suis chez moi à Mayotte » dit-il devant le tribunal, visiblement toujours blessé par l’insulte.
« Vous faites partie des parents difficiles »
Entre les deux, le différent remonte à plusieurs mois. L’instituteur propose de réorienter un enfant âgé de 4 ans de sa classe vers une autre, entre deux niveaux. «Ça me semblait plus adapté à son développement». Une telle décision n’est pas acceptable pour la mère. Pour elle, cela revient à stigmatiser le petit. Depuis ce jour, elle n’adresse plus un mot à l’instituteur, pas même un bonjour. L’enfant lui-même ne salue plus son instituteur.
« Le directeur dit que vous faites partie des parents difficiles, fait remarquer le président. Vous faites des remarques régulièrement. Il vous arrive d’entendre votre enfant pleurer alors que vous êtes à des kilomètres. »
« Elle a répondu à une provocation, plaide son avocat. Ils ne se parlent plus depuis quatre mois et (l’instituteur)lui dit ‘Madame, la moindre des choses, c’est de dire bonjour.’ C’est une provocation. »
20.000 euros de dommages et intérêts
Le président tente le compromis : « Ce qui serait opportun, c’est de trouver une solution intelligente à ce problème.» Et de fait, la mère concède des excuses pour « s’être emportée » avant que son avocat demande à son compagnon présent à l’audience de se lever. C’est un Mzungu (européen).
«Que demandez-vous ? » interroge le président. L’instituteur, pris au dépourvu, réclame que la loi soit appliquée et qu’elle soit sanctionnée.
-Vous pouvez demander une somme entre 1 et 100.000 euros de dommages, explique la procureure.
-20.000 !
«Aujourd’hui, compte tenu de l’actualité, explique la procureure dans son réquisitoire, les écoles doivent être protégées de toutes les attaques, quelques qu’elles soient… même si ce n’est pas la pire des attaques qu’ait connu une école.»
La mère, reconnue coupable, est condamnée à une amende de 150€ avec sursis. « Il a été manifestement touché par cette affaire, conclut le président. Je fixe à 200€ le montant du préjudice que vous devrez lui verser. »
Depuis la rentrée, l’enfant n’est plus scolarisé dans l’établissement de l’instituteur. A moins d’un appel, l’affaire est close.
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