La rencontre entre François Hollande et Ikililou Dhoinine, les présidents français et comorien, avait initié le réchauffement entre les deux Etats. Le Haut Conseil Paritaire est censé l’ancrer, mais des dissonances se font entendre.
Les deux présidents s’étaient rencontrés le 21 juin 2013 donnant lieu à la Déclaration de Paris sur l’amitié et la coopération entre la France et les Comores. L’acte est censé « refonder les liens historiques et étroits qui les unissent et de donner une nouvelle impulsion aux relations bilatérales afin de répondre aux aspirations des deux peuples ».
Les aspirations de la France, on les connaît : réguler le flux d’immigration clandestine qui gonfle la démographie en déversant sur les côtes mahoraises de nombreux kwassas (barques) dont les traversées depuis Anjouan se terminent souvent en naufrages.
Celles de l’Union des Comores se résument le plus souvent à la reconnaissance, soutenue par l’Organisation des Nations Unies, de l’appartenance politique de Mayotte à leur archipel.
Dans une perspective de conciliation, un « Haut Conseil Paritaire » a été mis en place, chargé de préciser les principaux axes de coopération. Il s’est réuni les 28 et 29 novembre 2013.
Accord sur les visas
Les deux présidents ayant estimé que la circulation des biens et des personnes « contribue au rapprochement des populations et qu’une maîtrise concertée de cette circulation constitue un facteur de stabilité de l’archipel et de développement », la facilitation des visas est un des premiers engagements du Haut Conseil Paritaire. Une mesure demandée par les hommes d’affaires lors de la conférence « Concept Canal du Mozambique » et qui concerne les voyageurs ayant « un intérêt effectif à se rendre à Mayotte ». Les visas sanitaires, ceux favorisant les rapprochements familiaux ou les visas destinés aux étudiants sont également concernés.
Les secteurs ciblés pour l’indispensable coopération entre les îles de l’archipel ont également été abordés, essentiellement en matière policière et judiciaire, appelant l’Union des Comores à contrôler ses frontières.
Mais depuis cette déclaration, les voix contestataires en provenance de l’Union des Comores se font de plus en plus nombreuses. Du comité Maoré tout d’abord, rapporté par le site Malango actualité, qui n’admet pas la présence de la gendarmerie sur les côtes anjouanaises censée empêcher tout départ d’embarcation, mais qui regrette surtout de ne pas avoir été appelé pour intégrer ce Haut Conseil Paritaire.
Pas sur la coopération judiciaire…
Même reproche du côté de Franco-Comoriens habitant Mayotte, qui veulent aussi faire entendre leur voix « mais anonymement, le sujet est trop sensible », invoquent-ils. A.B. notamment, demande une meilleure légitimité de la représentation comorienne : « Le président Ikililou a mandaté pour négocier des personnalités qui n’avaient même pas voté pour lui. Quelle confiance peut-on leur accorder ? » Il demande que les forces vives du pays, associations, partis politiques, élus, soient sollicités pour participer aux réunions du HCP.
Et dénonce les incohérences du gouvernement « quand il assure qu’il ne sera jamais question de voter pour une convention qui remette en question l’intégrité territoriale des Comores et qui accrédite en même temps une coopération visant à combattre l’immigration clandestine vers une île que nous considérons comme comorienne ! On peut lancer une coopération policière et judiciaire avec la France, mais pas avec Mayotte ! »
Ces détracteurs disent avoir été rassurés par une déclaration gouvernementale datant de lundi : « Le dernier mot reviendra de toute manière à nos députés ». Quant à la coopération commerciale, A.B. est pour, “mais la seule compagnie maritime qui assure la liaison a monté ses taux de fret à un euro le kilo… Il est impossible d’exporter des litchis depuis Anjouan à ces conditions!”
Le gouvernement français annonce sur son site que la prochaine réunion du Haut Conseil se tiendra aux Comores au premier semestre 2014.
Anne Perzo-Lafond
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