Les contraintes sont nombreuses à Mayotte pour faire sortir un légume de terre, une solution : la greffe.
D’un côté, un plan d’aubergine aux légumes immangeables, mais très véloces dans le sol, de l’autre une solanacée subtile au goût, mais bien frêle en terre. La solution, c’est le greffon ! Jeudi 12 décembre, la Chambre de l’agriculture (Capam) a organisé sa 12ème journée de formation à destination des maraîchers sur le thème de la greffe.
“Le gros problème à Mayotte c’est une bactérie dans le sol, la Ralstonia solanacearum. Elle existe partout dans le monde mais elle est particulièrement présente à Mayotte”, explique Luc Van Huffel, ingénieur agronome de la Capam. Ce micro-organisme est la plaie des maraîchers. Son impact est radical en provoquant le flétrissement de la plante. En quelques heures, le pied de tomate ou d’aubergine peut mourir : la bactérie pénètre par la racine et bouche tous les apports en eau et en minéraux de la plante.
Des traitements du sol existent mais sont désormais interdits en raison de leur impact négatif sur la terre. La greffe permet d’adapter un végétal à un sol récalcitrant en utilisant les propriétés d’une autre plante. La technique remonte à l’apparition de l’agriculture.
Associer deux variétés
Pour contrer la bactérie, l’antenne du CIRAD à Mayotte, sous l’oeil expert de Thomas Chesneau, travaille sur l’identification d’espèces résistantes à ce fléau. Sur l’île, la souche n’est ni africaine ni réunionnaise, elle est asiatique. Le travail consiste donc à trouver des variétés asiatiques résistantes. C’est chose faite avec la Surya pour l’aubergine. La Surya produit une petite aubergine amère, sans aucun intérêt gustatif. Par contre, la variété est une championne des racines, profonde, robuste et résistante à la bactérie, ce sera le porte-greffe. Il suffit de l’associer à une espèce intéressante en cuisine, ce sera le greffon.
Après avoir semé les deux variétés, le maraîcher les coupe au même diamètre et au même niveau de croissance, puis les associe pour n’en faire qu’un seul et même pied à l’aide d’une bague en silicone. La résistance du Surya associée aux qualités gustatives d’une aubergine de table permet à l’agriculteur de sécuriser sa production. “Les résultats sont très bons, il y a un grand enthousiasme des professionnels sur le sujet”, rapporte Luc Van Huffel.
Afin de développer et d’étendre la technique déjà utilisée par de nombreux maraîchers, un kit de plantation avec une plaquette explicative a été distribué jeudi dernier à la vingtaine d’agriculteurs présents sur le site de la Direction de l’agriculture, des ressources terrestres et maritimes du Conseil général à Dembéni.
En ce début de saison des pluies, c’est aussi le ciel qu’il faut scruter. Une pluie tropicale est aussi dévastatrice pour de frêles salades qu’une bactérie dans le sol.
Axel Lebruman
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