Toute la semaine, à l’occasion des 25 ans de l’Adie, le JDM vous propose des portraits de Mahorais qui tentent de créer leur propre emploi grâce au micro-crédit. Aujourd’hui, à Pamandzi, Attoumani a fait de sa passion pour le bricolage, son métier.
«Voyez mes mains, comment elles sont ! Moi, je passe tout mon temps à bricoler.» Attoumani Abou-bacar a effectivement les pognes d’un travailleur manuel. Plus qu’un bricoleur, c’est un transformateur de matière, un faiseur d’objet. Avec des bambous, il fabrique des sifflets pour les enfants ou des petits xylophones. Avec le bois, il crée de petits animaux. Mais, ça matière favorite reste les cocos.
«Avec la première peau, je peux faire des fleurs. La 2e protection, je la travaille pour fabriquer des formes ou des cordes. Avec la coque, on peut faire des petites tortues ou des corps de lampes que je peux habiller avec les tiges.»
Sa boutique regorge d’objets en tout genre. Mais sa grande fierté, ce sont ses cerfs-volants. «J’étais en Indonésie quand j’ai vu des jeunes jouer sur la plage. J’ai trouvé ça génial. Au lieu de faire n’importe quoi, les enfants s’amusaient. J’ai pris des modèles et j’en ai fabriqué avec du tissu. Après, je suis allé à Mamoudzou et j’en ai fait décoller un. Tout le monde est venu voir pour essayer !»
Les cerfs-volants, ce sont les plus grands succès de sa boutique. Il en a vendu plus de 200. Mais y a-t-il un objet qui ne soit pas un succès ? Il est lui-même surpris de la rapidité à laquelle ses stocks s’épuisent. A côté de sa «petite » boutique, quand il ne vend pas, il fabrique encore et toujours dans un petit atelier, sans pouvoir tenir la cadence.
Importer ce qu’il ne peut pas fabriquer
Il a bien essayé de faire des masques, mais il n’était pas satisfait du résultat. Alors, Attoumani a décidé d’importer ce qu’il ne pourrait fabriquer lui-même. Afrique, Inde et donc Indonésie, il a fait quelques voyages pour choisir les objets qu’il a ensuite fait venir dans de grandes malles. «C’était une grande aventure, une expérience à vivre ! Des frontières à passer, d’autres façons de se comporter, d’autres langues…» Et apprendre à gérer les importations à Mayotte.
Pour moi, le plus stressant, ça n’a pas été de démarrer. C’est de durer. Satisfaire les demandes des clients, ne pas être en rupture. On me demande toujours des choses nouvelles.
Il a démarré son activité en août mais il n’a ouvert sa boutique à Labattoir qu’en octobre. Là encore, pas facile de trouver des locaux. Il a emprunté partout où il a pu. A l’Adie 5.000 euros, un prêt NACRE de 3.000 euros et à ses proches grâce auxquels il a rassemblé 13.000 euros. «Les premiers que j’ai dû rembourser, c’est la famille ! Dans le monde d’aujourd’hui, on te dit toujours : ‘je te donne de l’argent mais tu rembourses très vite !’»
S’installer dans la durée
Aujourd’hui, il sent qu’il faut passer à la vitesse supérieure. S’agrandir pour installer son activité dans la durée. Il voudrait se rendre, à nouveau, chez ses fournisseurs asiatiques mais cette fois-ci pour remplir un gros container. «Il me faudrait 25.000 euros pour faire ça. L’Adie peut prêter jusqu’à 10.000, il faut que je réussisse à trouver le complément.»
En attendant, il continue de fabriquer les objets que son savoir-faire lui permet de faire naître. «Je suis en train de terminer une fontaine en bois. Je travaille dessus deux ou trois heures par jour. Ca prend beaucoup de temps même si les clients ne s’en rendent pas compte. Ce qui est génial quand tu fais de l’artisanat, c’est quand tu vois que les gens sont touchés par ton travail. Je suis curieux, comme toujours, de savoir qui va acheter ma fontaine et où elle va faire sa vie.»
RR
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