L’île souffre d’un manque de cohérence et surtout de moyens pour informer et offrir aux femmes une information de qualité sur la planification des naissances.
Interpellés par une infirmière dont la patiente n’a pu avorter en temps et heure, nous avons appris que le centre d’orthogénie avait été fermé pendant trois semaines en décembre, «un dysfonctionnement qui ne se reproduira plus», nous indique Etienne Morel, directeur du CHM.
A Mayotte, on pratique environ 1.000 interruptions volontaires de grossesse (IVG) chaque année, dont 300 médicamenteuses et 700 par intervention (Source CHM). Chiffre à rapprocher des 6.500 naissances qui donne à l’île sa réputation de plus grosse maternité de France. Mais l’IVG est un acte difficile à vivre pour la femme, et qui ne devrait rester qu’exceptionnel lorsque la politique de contraception fonctionne correctement.
Ce n’est pas le cas. Compétence du Conseil général, le planning familial est chargé d’informer les femmes sur la méthode contraceptive qui leur convient le mieux. Mais on connaît les difficultés du département, rappelé à l’ordre cette semaine par la conseillère générale de Dembéni, Sarah Mouhoussoune, «revenons vers les problématiques de la population».
L’immigration au cœur de toutes les politiques
Comme le rappelait le président Daniel Zaïdani, l’ampleur de la prise en charge est énorme avec 80% de la population qui consultent en PMI, contre 20% en métropole. Une différence qui s’explique par un faible niveau de vie mais aussi par l’arrivée de migrants sur l’île, «cela va au delà de notre mission», revendique le président du département qui en appelle à l’Etat.
L’Agence Régionale de Santé (ARS) Océan Indien supervise à la fois La Réunion et Mayotte. «Nous recollons les morceaux d’une politique de contraception éparpillée sur le territoire entre PMI, associations et nos services», indique le docteur Sylvain Lerasle, en charge de la Politique de la Prévention pour l’ARS.
Des moyens qui ne sont pas à la hauteur de la tâche, mais qui permettent néanmoins d’éviter que la situation n’empire : «Nous proposons aux femmes la pilule de niveau 2, des implants sous cutanés et le stérilet». Les sages-femmes aussi sont sollicitées : «Elles sont formées et ont le droit de prescrire».
Définir un coordinateur
La culture est toujours prégnante dans ce domaine où les femmes souhaitent aussi «laisser faire la nature» à Mayotte : «elles refusent souvent l’IVG dans le cadre de grossesses thérapeutiques ce qui implique de pouvoir prendre en charge ensuite les enfants handicapés».
Les distributeurs de préservatifs, testés il y a quatre ans dans le cadre de la lutte contre le VIH Sida, ont été abandonnés, «on va tenter de passer par les doukas».
Un Mouvement de Planning familial est présent à Sada, «sans véritable rapport avec le Planning familial». Il est financé par l’ARS, la préfecture par la Politique de la ville «et intervient sur la prison de Majicavo et les milieux de la prostitution».
A Mayotte, la planification familiale «c’est comme Monsieur Jourdain, tout le monde en fait», mais les actions sont dispersées, «il faut avoir un regard différent des autres départements et structurer l’ensemble dans une politique cohérente», conclut le docteur Sylvain Lerasle.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* « ça suffit ! », limitation des naissances à 3 enfants
Comments are closed.