Lorsque le Sieam (Syndicat Intercommunal d’Eau et d’Assainissement de Mayotte) a découvert en 2013 l’imposant mur de pierre sis sur la parcelle du Domaine de Coconi (Ouangani) destinée à recevoir la Station d’Epuration intercommunale Centre, il a aussitôt sollicité l’expertise de la Direction des affaires culturelles (DAC).
« Un premier sondage et des relevés effectués sur une centaine de mètres carrés au début du mois de mai 2013, permettent de comprendre l’organisation du site. En dehors du mur et des traces d’installation de machines, nous avons retrouvé l’emplacement d’un foyer et d’un tunnel de chauffe », rapportait dans le MAGE, journal du Sieam, Edouard Jacquot, Conservateur du patrimoine chargé de l’archéologie à la DAC, qui confirme qu’il s’agit bien d’un établissement sucrier, mais parmi les plus petits qui ont existé à Mayotte.
Les vestiges ne méritant malgré tout pas la protection au titre de monuments historiques, il fut décidé de pratiquer de l’archéologie préventive, une première à Mayotte. Il s’agit de prélever des vestiges dans le cadre de futurs travaux.
Le dispositif français d’archéologie préventive n’étant pas encore installé dans le département, c’est le service d’archéologie de la Dac océan Indien, basé à La Réunion, qui a évalué le patrimoine archéologique de l’ancienne sucrerie du Domaine de Coconi. Jusqu’au 3 juillet, quatre archéologues de l’Inrap vont ainsi fouiller les vestiges, collecter des données sur l’architecture, l’organisation de la sucrerie, son évolution, le mode de vie de ses occupants ainsi que son fonctionnement.
Des bâtiments, réduits aux murs de soutènement pour partie effondrés, sont installés sur plusieurs terrasses, sans doute artificielles, entre la RN2 et la rivière Mro Oua Coconi.
Briques importées
Des pièces de machines sont aussi éparpillées autour des ces vestiges : ces dernières correspondent à l’inventaire établi en 1873 après décès d’un dénommé Cadet pour le domaine de Coconi, un des petits établissements sucriers qui fonctionnèrent pendant la brève période industrielle de l’île, dans la seconde moitié du XIXème siècle, et dont l’histoire est moins documentée que les principaux domaines de la Grande Terre.
Des pièces qu’Ahamada Colo Madi Oili, Chargé des Opérations Foncières au Sieam, et enfant de Chiconi, veut conserver : « on va les restaurer et les exposer. Il faut partager ce patrimoine ! ».
La zone de production est reconstituée : la chaudière principale alimente le moteur à vapeur, qui permet le broyage par le moulin à cannes. Suivent alors différentes opérations qui utilisent des machines spécifiques : première décantation, évaporation, cuite et enfin raffinage. Le mode de construction associe matériaux importés (briques de Montoire, machines d’origine nantaise ou britannique…) et ressources locales (moellons basaltiques et chaux corallienne).
Les dix-sept usines sucrières de l’île sont le témoignage de l’époque de la vapeur. Le patrimoine technologique de Mayotte qui peut-être mieux connu, car si ces vestiges sont encore lisibles dans le paysage mahorais, ils ne doivent pas faire oublier les sites plus anciens. Les premières traces d’occupation humaine remontant aux VIIIe-IXe siècles de notre ère, l’île présente un potentiel archéologique important que les fouilles préventives permettront sans doute dans l’avenir de mettre en lumière.
Le site sera ouvert au public samedi 5 juillet de 9h à 14h.
A.P-L.
Le Journal de Mayotte
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