Le marché couvert de Mamoudzou a un nom. Depuis ce lundi 10 novembre 2014, il s’appelle «marché Zakia Madi», du nom d’une jeune femme décédée lors d’une manifestation pro-française. C’était il y a 45 ans.
Réparer une injustice de l’histoire. Aucun mot ne semble assez fort ce lundi soir pour célébrer Zakia Madi, au moment où son nom est donné au marché couvert de Mamoudzou. Ce marché est un des ces bâtiments emblématiques de la ville devenue préfecture d’un département français, capitale d’une région ultrapériphérique de l’Union européenne, chef-lieu «d’un territoire comme elle aurait aimé qu’il soit», dit le préfet Seymour Morsy.
Le nom de Zakia Madi était pourtant tombé dans l’oubli, avant que la jeune femme redevienne un symbole, et son nom, l’emblème d’un combat politique dont les passions sont encore bien vivaces.
Un destin tragique
Zakia Madi n’avait “que 16 ans” lorsqu’elle perd la vie, indique le préfet. «16 ans», un frisson circule à l’évocation de son âge parmi les plus jeunes femmes du groupe de Déba invité pour l’occasion sur la Place de la République.
Le 13 octobre 1969, la manifestation organisée à Mamoudzou tourne mal. Elle est dispersée dans la violence par «la garde comorienne». Des grenades tombent sur la foule. On dénombre une vingtaine de blessés et une victime : Zakia Madi. Ce fut «la première martyre du difficile et long combat pour la départementalisation de Mayotte», une «véritable héroïne», lance Bacar Ali Boto, 1er adjoint au maire de Mamoudzou. «Une humble militante imprégnée d’un bel idéal», rajoute Issoufi Hamada.
Pour le vice-président du conseil général, il s’agissait à l’époque de «se battre pour réduire l’influence des autres îles des Comores» alors qu’aujourd’hui Bacar Ali Boto souligne l’importance de maintenir la flamme du combat politique chez les jeunes et leur permettre de devenir «de vrais patriotes».
Chatouiller nos esprits
Si le nom de Zakia Madi ne parvenait plus aux oreilles du plus grand nombre, sa mémoire était encore commémorée chaque année par un petit groupe de bénévoles, rappelle Issoufi Hamada, pour qui «elle appartient désormais à l’ensemble de Mayotte».
Finalement, dans notre département, quoi de plus normal d’honorer une femme, constate le préfet qui poursuit actuellement une tournée des communes. Alors qu’il travaille à l’émergence de contenus et de propositions pour le pacte Mayotte 2025, il a l’occasion de rencontrer beaucoup de femmes et peut ainsi constater qu’elles occupent «une place toujours aussi importante», «aux avant-postes pour proposer, faire et avancer».
Zakia Madi fera donc ainsi partie pour longtemps «de ces grandes dames qui continueront de chatouiller nos esprits».
Rémi Rozié
Le Journal de Mayotte
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