CARNET DE JUSTICE DU JDM. «Pratique de la pêche maritime dans une zone interdite». C’est le chef d’accusation dont devait répondre Nidhoimi, ce mardi après-midi au tribunal de Mamoudzou. Concrètement, il devait expliquer pourquoi la barque dont il est propriétaire a été surprise à la dérive au-dessus de la barrière de corail, en train de mettre ses filets à l’eau, par l’hélicoptère de la gendarmerie. Et pourquoi, les gendarmes dépêchés sur place ont découvert des glacières remplies de poissons de récifs.
Nidhoimi n’était pas sur l’embarcation mais son statut de patron de pêche l’oblige à répondre des pratiques des personnes qu’il embauche, même s’il renvoie les marins à leur responsabilité. «Ca s’est passé mais ils avaient lancé les filets et avec le courant, ils ont dérivé vers la barrière… C’était des jeunes avec une formation… On se demande à quoi ça sert d’avoir une formation !»
La dérive, c’est une justification régulièrement mise en avant au tribunal sans vraiment convaincre. Et Nidhoimi ne peut pas vraiment affirmer qu’il ignorait la loi. Il a déjà été condamné pour les mêmes faits : «le filet s’était accroché à la barrière la dernière fois. Une fois, ça peut arriver mais quand on est contrôlé plusieurs en disant ‘c’est pas moi, c’est eux’ tout en récupérant le produit de la vente du poisson, ça fait un peu beaucoup», relève le juge Soubeyran.
«En tant que patron pêcheur, je ne peux pas dire autre chose qu’il faut respecter la nature», affirme Nidhoimi, passé maître dans l’art de dire ce que le tribunal veut entendre.
Interdiction de naviguer
Connu de la justice, Nidhoimi est aussi bien connu des affaires maritimes. Un administrateur des «Aff’mar» est d’ailleurs venu au tribunal ce mardi après-midi, en grande tenue, pour rappeler quelques éléments d’évidence : « l’arrêté interdisant la pêche au filet sur le récif coralien est tout à fait connu des professionnels et le patron de pêche est donc responsable de la manière dont il pêche. Il ne s’agit pas d’accabler les pêcheurs au filet et de les empêcher de travailler. Mais pour (le prévenu), on ne peut que constater une accumulation de mauvaises pratiques.»
En effet, la barque mise en cause était sous le coup d’une interdiction de naviguer et ne disposait d’aucun titre de sécurité. Elle ne devait pas prendre la mer. Nidhoimi le sait, il a même signé une convention avec les affaires maritimes portant sur un nouveau navire, aux normes. «Je veux continuer à faire de la pêche mais plus au filet, à la palangre», affirme-t-il.
9.000 euros avec sursis
«Pour continuer la pêche, il va falloir respecter les règles», tranche le magistrat. Nidhoimi est condamné à 10.000 euros d’amende mais la sentence vise surtout à changer son comportement : l’essentiel de la sanction, 9.000 euros, est une amende avec sursis. Il ne devra les verser que s’il est, à nouveau, pris en infraction.
Nidhoimi prendra-t-il cette décision au sérieux ? C’est sa légèreté qui l’a amené à la barre. Il aurait, en effet, pu éviter le tribunal. Une composition pénale, une sorte de médiation, l’avait condamné à verser 250 euros. Il l’avait accepté mais il n’avait finalement pas payé…
RR
Le Journal de Mayotte
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