La filière aquacole est périodiquement sous le feu de projecteurs pour son ambition en inadéquation avec les moyens qu’elle se donne. Une nouvelle preuve avec les difficultés de la société en charge de fournir les alevins.
Aquamay est une association créée en 1999 à l’initiative de la collectivité départementale de Mayotte, avec pour mission de promouvoir et de développer les cultures marines à Mayotte. Elle reçoit pour cela des aides conséquentes du département.
Elle doit en contrepartie favoriser l’émergence d’une véritable filière de production aquacole à Mayotte. La société élève des alevins qu’elle revend à Mayotte aquaculture.
La préfecture, en réaction à un article paru dans un média local, informe des difficultés actuelles de l’entreprise qui a fait l’objet d’un récent audit financier par la Direction régionale des finances publiques de Mayotte, « qui a relevé de nombreux dysfonctionnements au point de vue comptable ».
Aquamay avait déjà connu par le passé des déboires avec notamment des décès d’alevins qui avaient contraint la production, et freiné le développement de la filière. Un constat qui avait incité l’investisseur Jean-Claude Pastorelli, repreneur de Mayotte aquaculture, à envisager de créer sa propre écloserie.
La filière est toujours orientée vers le développement, annoncé comme exponentiel par ce dernier qui compte sur les fonds européens.
Procédure d’alerte
En ce qui concerne Aquamay, la préfecture annonce que « toute demande de financement supplémentaire provenant de cette association a été suspendue en attente du rétablissement de conditions de gestion comptable et financière rigoureuses », et dresse un tableau peu engageant puisque « le commissaire aux comptes de l’association a engagé une procédure d’alerte ».
Depuis le 1er janvier 2014, le secteur aquacole ne peut plus bénéficier de crédits ODEADOM (crédits nationaux) sur l’importation d’aliments. Compte-tenu de la situation de la filière, Aquamay a toutefois reçu une aide financière exceptionnelle en 2014 (pour des engagements juridiques 2013). « Cette aide devait lui permettre d’augmenter sa production et d’assainir sa situation financière, ce qui n’a pas été fait », précise le représentant de l’Etat.
« Si ça continue, je ferme ! »
Le président d’Aquamay, Dominique Marot, que nous avons contacté crie au complot, et menace : « si je n’ai pas les subventions de l’Etat et du conseil général, je ferme boutique dès le mois de mars ! » Il parle d’un FEAMP (fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche) retardé, mais la préfecture rappelle que ce fonds ne peut en aucun cas être affecté au fonctionnement d’une entreprise.
L’Union européenne a mis en place un plan de compensation des surcoûts propres aux régions européennes ultra-marines (86M€ pour la période 2014-2020) qui bénéficiera à la filière de la pêche et de l’aquaculture mahoraise mais sous réserve d’éligibilité des bénéficiaires et de situation financière saine des entreprises concernées : « il est entendu que les fonds européens n’ont pas vocation à soutenir des entreprises en difficultés financières. »
Selon le communiqué de la préfecture, la chaîne d’approvisionnement des aquaculteurs en alevins n’est pas rompue : « l’importation d’alevins par Aquamay, comme ce fut le cas en 2014, permettra à la filière de continuer à s’approvisionner malgré un contexte de forte concurrence qui ne permet pas d’augmenter la production. »
A.P-L.
Le Journal de Mayotte
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