Le Conservatoire du littoral et le conseil départemental faisaient le bilan de leur action entre 2006 et 2015 pour protéger les îlots, les mangroves et certains sites comme Saziley. Du positif et de toute évidence, encore beaucoup de travail.
«On est lancé dans un marathon», explique Catherine Latreille, déléguée de l’antenne océan Indien du conservatoire du littoral. Ce mardi, c’était donc un peu le ravitaillement dans cette course à la préservation du littoral mahorais, une épreuve avec le vent de face et où on serait prêt à autoriser le dopage.
Car les problématiques liées à la protection, l’entretien, la sécurisation, la valorisation semblent encore à leur tout début.
Il y a 9 ans, le conservatoire du littoral signait une convention avec le conseil général. Le conservatoire peut en effet acheter ou recevoir des parcelles pour les protéger mais il ne peut pas les gérer. Le CG est donc celui qui a été chargé de le faire. La convention vient à expiration le 15 juin, les discussions vont commencer pour savoir si le nouveau CD (conseil départemental) continue sur les 7 sites dont il a la responsabilité.
Car qui dit fin de contrat, dit bilan. Quelques données permettent de mesurer des progrès : en 2006, 5 sites protégés couvraient 920 hectares. Ils sont actuellement 18 sites sur 1.845 hectares. Ce sont 2M€ qui ont été utilisés pour acheter près de 38 ha, le reste a été transféré en gestion.
C’est évidemment deux fois mieux qu’il y a 9 ans mais cela reste très peu au regard du territoire mahorais.
«Ca reste aussi probablement insuffisant au regard de la pression démographique à venir. Dans 15 ans, on prévoit 400.000 Mahorais et il va falloir organiser l’espace pour loger tout le monde, leur donner des lieux de travail, de loisirs mais aussi des espaces naturels à transmettre aux générations d’après, avec des espèces qu’on ne trouve qu’à Mayotte», précise Catherine Latreille.
Protéger les mangroves
Dans ces conditions, tout n’a pas vocation à être protégé mais certaines zones, comme les mangroves le sont.
«500 ha de mangroves supplémentaires seront protégés d’ici la fin de l’année. On continue de discuter avec les 16 communes concernées. L’idée est de les protéger en totalité pour éviter ce qui s’est passé à une époque où, à Mayotte, on a détruit des espaces au profit d’équipements structurants. Il y a aujourd’hui un enjeu très fort pour la France qui s’est engagée sur cette question au niveau international.» A Longoni, la question pourrait donc être sérieusement posée.
Qui dit bilan dit aussi critique. Et si le début de matinée était consacré à la présentation de bilans des actions sur chaque site «pas très réalistes» selon le sentiment très largement partagé de Michel Charpentier des Naturalistes de Mayotte, la suite de la journée était consacrée à des ateliers où la parole a pu se libérer. Une critique pour changer les choses.
Crise à Saziley
L’atelier consacré à la conservation des milieux a permis de poser la question de l’état de Saziley, «un site qui avait la réputation de l’excellence et qui bénéficie aujourd’hui d’une image dégradée». Malheureusement pas que l’image. Problèmes de fréquentation, de déchets, de braconnage, d’insécurité, de présence de chiens qui s’attaquent aux tortues… La situation y est nettement pire qu’il y a 9 ans. Conclusion de l’atelier : «la nécessité absolue de reprendre le terrain», avec une présence humaine permanente où la maison des gardes accueillerait des acteurs associatifs, «civiques», des chantiers d’insertion… et pourquoi pas de véritables «rangers» commissionnés et armés.
Avec l’insécurité, l’agriculture sauvage est le second problème dominant sur la quasi-totalité des sites. Bananiers et maniocs continuent de prendre la place des espèces locales et parfois endémiques… y compris d’ailleurs dans certaines zones protégées.
Présence sur les îlots
Cris Kordjee proposait avec l’atelier valorisation de «définir la capacité d’accueil des sites et de mettre en place une politique tarifaire qui s’accompagnerait de services (toilettes, accompagnement…etc.).
Réguler la fréquentation avec des protocoles précis, «rétablir l’état de droit sur l’îlot Mtsamboro», casser le cercle des mauvaises habitudes (sono et techno à fond tous les samedis soir) sur l’îlot Bandrélé… les propositions ont été généralistes ou précises mais toujours portées par des acteurs qui connaissent bien les terrains.
Enfin la question du statut de protection de certains sites était posée. Réserve «naturelle», «biologique» ou autre permet parfois de prétendre à des financements qui pourraient effectivement être une des clés pour s’attaquer à certains problèmes.
RR
Le Journal de Mayotte
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