Le collectif à l’origine de la marche de Kawéni a rassemblé environ 80 jeunes autour de nombreuses autorités pour parler. Sans les parents et sans les journalistes, libérer la parole pour faire avancer le quartier.
Ils ont parlé de leur vie et de leur quartier. Vendredi après-midi, sans les parents et sans les médias, environ 80 jeunes de Kawéni ont échangé de façon très franche mais aussi «très respectueuse» selon Julien Gauquelin du collectif à l’origine de l’initiative avec des autorités prêtes à jouer le jeu : vice-procureur, délégué du préfet, policiers, représentants de la BAC, de la jeunesse, sport et cohésion sociale (DJSCS) et d’élus de la mairie.
Les jeunes ont parlé des évolutions qui marquent la vie du quartier. Les médiateurs de nuit ont ainsi disparu depuis quelques mois. «Pourtant, c’était plus calme quand ils étaient là», souligne Julien Gauquelin. Certains des jeunes présents occupaient d’ailleurs ces postes.
Les échanges valaient dans les deux sens. Les jeunes ont entendu leurs droits mais aussi leurs devoirs et des infos comme par exemple ces chiens non tatoués que les mineurs ne peuvent pas posséder. Des contrôles seront d’ailleurs menés dans les semaines qui viennent.
Alerte sur les 12/13 ans
Les plus âgés, jeunes majeurs ou presque, ont aussi alerté sur les comportements de plus petits. «Beaucoup ont fait des bêtises mais aujourd’hui, les 12/13 ans sont beaucoup plus violents. Ils sont sans scrupules et sans limites.»
Les plus âgés sont prêts à s’investir pour les encadrer et remettre en place une forme d’autorité qui serait d’autant plus entendue qu’elle viendrait de ceux qui ont connu une période de délinquance. Mais cette volonté butte sur une chose : le manque de moyens, pour dire la réalité simplement, la misère.
Comme attendu les jeunes demandent essentiellement deux choses pour leur vie: des formations et du travail. «Ils ont besoin qu’on les accompagne pour décrocher du travail. Pour les entreprises, les jeunes de Kawéni sont tous des délinquants qu’il faut éloigner. Mais elles doivent aussi leur donner leur chance et en prendre quelques-uns à l’essai», explique Julien Gauquelin.
«Il ne faut pas attendre et il faut se bouger et continuer à frapper aux portes», ont répondu en substance les autorités.
Des réponses individuelles
Le collectif a rempli des fiches individuelles avec les jeunes pour connaître leur parcours et leurs besoins et ainsi passer d’un discours général à des questions et donc peut-être des réponses précises.
La police et la BAC étaient en première ligne face aux critiques sur des comportements «agressifs ou provocateurs». «Beaucoup d’entre vous ont des talents pour réussir leur vie mais certains n’ont que des talents diaboliques», leur a répondu franchement le Capitaine Chamassi. La police est prête pourtant elle aussi à jouer un rôle, en proposant à des jeunes de partir en formation pour devenir agents de police. «Cette année, après 6 ans, 7 agents vont devenir gardiens de la paix», explique le Capitaine Chamassi.
Des heurts qui mobilisent les énergies positives
La police qui s’est retrouvée en première ligne après la réunion… D’autres jeunes, peu nombreux et d’un autre quartier de Kawéni, ont caillassé les forces de l’ordre avec deux policiers légèrement blessés, une interpellation et des gaz lacrymogènes qui sont tombés dans une école primaire où les personnels étaient encore choqués ce lundi matin.
De quoi mobiliser un peu plus le collectif pour avancer dans la responsabilisation et l’occupation des gamins. «Après la marche, tout n’allait pas changer du jour au lendemain. Mais on avance», indique Julien Gauquelin.
Un comité citoyen sera bientôt officialisé et un comité de surveillance est sur les rails. On y retrouvera des jeunes qui ont assisté à la réunion. Et des opérations sont prévues pour les vacances. Les bonnes volontés semblent n’avoir jamais été aussi nombreuses avec l’impératif de ne pas décevoir.
RR
Le Journal de Mayotte
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