Avant l’arrivée des premières baleines de l’année dans le lagon, le Parc naturel marin lance un réseau d’observateurs et sensibilise aux bonnes conduites pour observer les mammifères dans nos eaux.
«Quand les baleines arrivent, il y a un sentiment d’euphorie et on pense facilement qu’on a tous droit à son lot de baleines». Le message de Julie Molinier du Parc naturel marin de Mayotte est clair. Non, la nature n’est faite pour contenter nos envies de spectacle. «Il ne faut jamais oublier que l’on a affaire avec des animaux sauvages et que nous ne sommes pas dans un zoo», expliquait-elle le lundi 8 juin dernier au 5/5.
Le parc naturel marin (PNM) y tenait sa conférence sur l’observation des mammifères marins, pour partager des données sur l’état des connaissances mais aussi les mesures en vigueur pour profiter intelligemment du lagon sans en perturber le fonctionnement. Et cette année, le Parc va au-delà en faisant de chacun de nous des observateurs de la biodiversité marine.
Ce lundi soir, à 18h30 au cinéma Alpa Joe, le PNM et ses partenaires lancent TsiÔno («J’ai vu», en langue mahoraise), un réseau d’observateurs qui veut devenir une véritable «sentinelle» de la mer pour mieux la connaître grâce à la contribution de tous et améliorer la gestion de l’espace maritime.
En quelques clics sur www.tsiono.fr, chacun peut participer à ce programme et disposer d’un guide d’identification des espèces suivies, de fiches téléchargeables pour noter vos observations en mer ou encore d’une documentation utile à tous les usagers du lagon.
25 espèces de mammifères marins sont présentes à Mayotte sur les 32 que compte l’océan Indien, une richesse liée à la grande diversité des habitats sur nos côtes. Si nous n’avons pas de carnivores (ours et phoques habitent bien plus au sud), les cétacés sont les plus nombreux et les Siréniens sont encore chez nous, représentés par les dugongs plus que jamais en danger.
Les baleines à la saison
«Les baleines femelles viennent mettre bas dans le lagon, d’où la présence de groupes mère-petits mais on trouve aussi, au large, des groupes actifs de mâles qui se battent pour les femelles présentes près des côtes», détaille Jeanne Wagner, du PNM.
Six dauphins différents sont également présents dans les eaux de notre département.
Comme chaque année, en ce début de saison des baleines, de posent les questions de l’approche des animaux sans perturber leur cycle de vie. Des indications générales existent, doublées à Mayotte des recommandations du PNM : la zone d’observation doit se situer à une distance de 100 à 300 mètres des animaux avec un nombre maximum de 2 bateaux. Quant à l’approche, pour les dauphins elle peut être effectuée à moins de 100 mètres avec uniquement 2 bateaux mais elle est interdite pour les baleines à moins de 100 mètres.
Pas de mises à l’eau
Les touristes sont friands des mises à l’eau mais le PNM ne va pour autant dans leur sens. Le parc les déconseille très clairement, la perturbation des animaux étant alors maximale et les dangers sanitaires (transmissions de maladies) n’étant pas à exclure.
Enfin, dernières consignes : pas d’observation supérieure à 30mn et jamais après 14h pour garantir des heures de quiétudes aux animaux. «Sans ces limitations, on sait qu’à Mayotte, une mère baleine et son baleineau peuvent voir passer 50 bateaux entre 8h et 17h. Pendant ce temps, la mère et le petit vont beaucoup moins communiquer et le baleineau très peu se nourrir», explique Julie Molinier.
Une succession d’impacts individuels
Car lors des sorties sur le lagon, les plaisanciers ne se rendent pas forcément compte de cette succession permanente d’impacts individuels qui finissent par provoquer des changements dans le comportement des animaux. «On dispose d’études sur les baleines qui démontrent un changement de vitesse, des plongées plus fréquentes et plus longues et une interruption du chant des mâles perturbés par les bruits des moteurs», explique Alexandra Gigou du PNM.
Pour les dauphins aussi, l’impact peut être important avec des perturbations des phases d’alimentation, une baisse de la reproduction voire des changements des rapports sociaux, très importants pour ces mammifères.
Pour la 2e année consécutive, les opérateurs du lagon peuvent signer la charte du Parc qui atteste de leur volonté de respecter ce code de bonne conduite du Parc. Les signataires pourront, cette année encore, faire flotter le fanion «Baleine 2015» sur leur embarcation.
RR
Le Journal de Mayotte
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