La direction de la Somaco a saisi la justice pour obtenir, en référé, la levée du blocage de ces camions qu’elle estime avoir constaté. Les salariés contestent. Le jugement sera rendu ce mercredi matin en audience publique.
Cinq salariés de la Somaco, représentants syndicaux ou délégués du personnel, et le syndicat FO étaient cet après-midi à 15h sur les bancs des accusés. Face à eux, la direction du groupe de distribution qui estime que la société est confrontée à des entraves. Pour elle, depuis que le conflit a éclaté le 13 juillet dernier, ses camions de livraisons sont bloqués à la sortie du dépôt de Kawéni par les grévistes.
L’audience en référé, la procédure d’urgence de la justice, était présidée par le juge Planque qui a pris le temps de la pédagogie. Il n’a pas hésité à citer le préambule de la constitution qui consacre le droit de grève mais qui indique aussi qu’il doit s’exercer «dans le cadre des lois qui le réglemente».
A aucun moment, la question ne porte sur les revendications portées par la vingtaine de salariés en grève (sur les 135 que compte la Somaco). La justice doit se prononcer uniquement sur ce qui se passe sur le piquet de grève dans l’impasse de Kawéni où se situe le dépôt du groupe de distribution.
Deux constats d’huissier
Me Nadjim Ahamada, qui représente la société, a la parole en premier. «Nous ne sommes pas là pour envenimer les choses mais pour faire respecter les droits». Comme c’est la tradition dans ce type de dossier, il évoque le droit de circuler, le droit d’entreprendre, le droit de travailler pour les non-grévistes.
Il raconte aussi le climat qui ne cesse de se dégrader autour de ce conflit, parlant de deux plaintes déposées par des membres de la direction de l’entreprise pour des violences.
Sur le fond du dossier, il s’appuie sur deux constats d’huissiers réalisés les 13 et 20 juillet qui permettent, selon lui, d’établir le blocage des camions qui ne peuvent plus livrer les magasins du groupe.
Selon Me Ahamada, la Somaco perd 50.000 euros par jour depuis le début de ce conflit… «Après le conflit social de 2011, le climat économique détérioré actuel ou encore la grève à la SMART (sur le port), on ne peut pas s’en sortir si les salariés scient la branche sur laquelle ils sont».
«La pratique Sodifram»
Point par point, Me Yanis Souhaïli qui défend les salariés et le syndicat va répondre. Les pertes annoncées de la société? «L’ensemble des magasins est ouvert», fait-il valoir. Les constats de l’huissier ? «On peut leur faire dire ce qu’on veut», insiste-t-il. Il ne parle pas de blocage mais de filtrage des véhicules. Il dénonce aussi les méthodes de l’huissier «qui filme en catimini» les grévistes depuis le magasin à proximité du piquet de grève.
Pour Me Souhaïli, s’il y a eu certains blocages, ils s’expliquent par une incompréhension des grévistes qui voyaient d’autres salariés non-grévistes prendre leur place, voire des membres de la direction qui conduisaient des camions pour assurer les livraisons.
«Il n’y a plus de blocage !» s’exclame l’avocat. «Tous les grévistes sont dans cette salle d’audience.»
Décision en audience publique
«On veut stigmatiser le syndicat FO pour réitérer la pratique ‘Sodifram’. On dit que des délégués syndicaux font des blocages, on les assigne en justice puis on les licencie avec l’autorisation de la direction du travail», dénonce l’avocat. Derrière lui, le représentant du syndicat FO acquiesce. Oili Taanlavi Mouhoudoir était le représentant syndical au sein de la Sodifram. C’est lui qui a mené les dernières grandes grèves qu’a connu cet autre groupe de distribution. Il a depuis été licencié.
La Somaco réclame 500 euros d’astreinte par jour de blocage dès la 3e heure après la décision rendue. Elle veut aussi obtenir 3.000 euros de frais de justice de la part des salariés assignés.
De leur côté, les salariés et le syndicat ont plaidé pour le rejet de la demande de la société et pour obtenir 1.500 euros de frais de justice.
La décision sera rendue ce mercredi matin, à 8h30, en audience publique. Le juge souhaite, à nouveau, expliquer la décision qu’il aura prise.
RR
Le Journal de Mayotte
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