Qui est donc “Ahmed”, le jeune homme écroué pour l’enlèvement présumé du petit Rifki à Rennes samedi dernier? Parti de Mayotte alors qu’il était enfant, Ansuifoudine Ahamed aurait eu des enfants à La Réunion avant un «déracinement» en métropole qu’il aurait très mal vécu.
On en sait un peu plus sur celui que toute la France connaît sous le nom d'”Ahmed” depuis samedi et l’alerte enlèvement diffusée suite à la disparition d’un enfant de la communauté comorienne de Rennes, Rifki, âgé de 4 ans.
Ahmed s’appelle en fait Ansuifoudine Ahamed, il a 24 ans et, d’après les déclarations qu’il a faite durant sa garde à vue, il a connu une vie de galère et de misère entre plusieurs îles de l’océan Indien, dont Mayotte où il est né et la Réunion où il a vécu de nombreuses années, jusqu’à son départ pour la métropole il y a quelques mois.
Après avoir passé les premières années de sa vie à Mayotte, Ahmed passe par Madagascar. Il vient d’un «milieu défavorisé» et aurait lui-même subi des maltraitances intrafamiliales dans notre département. «Il raconte qu’il a subi des sévices sexuels de la part de son grand-père, mais aussi qu’il fumait de la drogue dès l’âge de huit ans, alors que son père l’envoyait en acheter pour lui», explique Me Emmanuelle Khan-Renault, l’avocate rennaise qui l’a assisté durant sa garde à vue, contactée par nos confrères du JIR.
Il parle le créole réunionnais
Durant son audition, le suspect s’est parfois exprimé en créole réunionnais, notamment lorsqu’il se mettait «en colère.» «Il a même demandé un interprète en créole pour être certain d’être bien compris», précise l’avocate.
Il aurait ainsi expliqué avoir été envoyé à la Réunion alors qu’il était encore mineur, pour y être placé en foyer d’accueil où, là aussi, il aurait subi des sévices sexuels. Majeur, il vit néanmoins un semblant de vie normale à la Réunion où «il dit avoir eu quatre enfants, de deux mères différentes», poursuit Me Khan-Renault. Des éléments difficiles à vérifier pour le moment, provenant des déclarations faites spontanément par Ahmed aux enquêteurs.
«Complètement paumé»
C’est toujours lui qui raconte que, «craignant des représailles pour une histoire de cambriolage», il aurait accepté de quitter la Réunion avec l’aide d’une collectivité locale pour suivre en métropole «une formation d’animateur.» Ce qui étonne compte tenu de son faible niveau scolaire, alors qu’il est «pratiquement illettré.»
C’est ainsi qu’il serait arrivé à Rennes il y a quelques mois. Sans apparemment démarrer sa formation. Il se retrouve rapidement sans domicile fixe. Et se rapproche de la communauté comorienne, dont la famille du petit Rifki chez qui il trouve refuge. «Son arrivée en Bretagne a représenté un choc pour lui. Il était complètement paumé», confie Me Khan-Renault.
Déjà mis en cause
Mis en cause dans une affaire d’attouchements sur mineur en juin dernier, il doit comparaître en janvier prochain devant un tribunal. Et il a spontanément reconnu en garde à vue avoir eu «un geste déplacé» envers le petit Rifki.
«Mais on ne sent pas pour autant quelqu’un de crapuleux. C’est quelqu’un de très perturbé, désorienté, qui dit souffrir d’épilepsie sans être suivi médicalement et a demandé à ce qu’on l’aide avec ses angoisses.» Si son état a été jugé compatible avec la garde à vue et qu’il dit n’avoir jamais séjourné en hôpital psychiatrique, les expertises médicales seront déterminantes dans la suite de ce dossier. Il devait déjà rencontrer un psychologue en septembre prochain dans le cadre de sa précédente convocation en justice. «Mais pour moi, même s’il est considéré responsable, c’est quelqu’un qui mériterait d’être sous tutelle», estime Me Khan-Renault.
«Peut-être qu’il n’aurait jamais dû venir en métropole. C’était un déracinement trop profond à supporter pour lui», conclut l’avocate rennaise.
Sébastien Gignoux
le JIR.
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