Garantir l’égalité de tous devant la loi, c’est le vaste rôle du Défenseur des droits. A Mayotte, la moitié des dossiers, concernent les enfants, dont des cas de maltraitance avaient été signalés. C’est ce qui a incité Geneviève Avenard, la Défenseure des enfants à venir à Mayotte.
Quand on parle de Défenseur des droits à Mayotte, on pense immédiatement à ceux des enfants en danger. C’est pourquoi c’est le plus gros du travail abattu par celle qui assurait le job à Mayotte, la déléguée territoriale du défenseur des droits Souniati Bamana, épaulée pendant un an par Sandrine Baloukji, et qui vont laisser la place le 1er octobre 2015 à un autre binôme, Sittinour Mohamed et Stéphane Bayig. Si nous commençons par eux, c’est parce qu’ils sont en première ligne pour dénoncer à la fois les abus de l’administration auprès des citoyens, mais aussi repérer les cas d’enfants en errance, voire de maltraitance.
Autorité indépendante, le défenseur des droits doit permettre l’égalité de tous dans l’accès aux droits. Et c’est souvent les plus vertueux qui pêchent : « à Mayotte, la moins obéissante, c’est la préfecture », confie une des délégués, « avec une obstruction physique à l’accès des détenteurs lors du renouvellement de leurs cartes de séjour de 10 ans, ce qui les fait basculer dans la clandestinité, ou des refus de délégation d’autorité parentale, bien que ce soit une décision judiciaire », déplore la jeune femme.
Blocage de l’action sociale
Sur la centaine de dossiers traités sur notre territoire en 2014, dont plus de la moitié concerne des enfants, beaucoup sont des réclamations individuelles : « ça va du refus d’ouverture de compte bancaire, à des lenteurs administratives exorbitantes, en passant par de la maltraitance institutionnelles. » Une accusation avait été portée contre des familles d’accueil du conseil départemental.
Encore impressionnée par « le nombre d’enfants qui vivent un quotidien difficile et précaire », la Défenseure des enfants Geneviève Avenard, adjointe du Défenseur des droits Jacques Toubon, présente depuis 5 jours à Mayotte, ne cache d’ailleurs pas que sa venue fait suite aux saisines qui lui remontaient sur des actions contraires aux intérêts des enfants
Ce qui lui a permis de rencontrer les président et vice-président du département : « le président a évoqué des blocages au sein de l’action sociale et a évalué les pistes à suivre, dont il a chiffré les actions à intégrer au budget 2016 L’Inspection générale des Affaires sociales doit l’aider à faire des choix. »
Gratuité de soins pour les enfants
Les blocages viennent aussi du volume de cas à traiter avec des crédits budgétaires contraints à répartir entre les PMI, « et pouvoir appliquer l’ordonnance sur la gratuité des soins aux enfants à naître, en remplacement des bons roses, et la scolarisation pour tous, en sortant des clichés de l’appel d’air. »
Au chapitre des améliorations, on peut noter la création de l’UDAF, l’Union départementale des associations familiales, « qui replace la famille au cœur du système », l’arrivée d’une antenne de l’Office français de l’Immigration et de l’Intégration « qui va permettre de traiter plus rapidement les cas des demandeurs d’asile, et la prochaine signature d’une Convention entre l’Etat et le département. »
La France entendue à l’ONU
Accompagnée d’Yvette Matthieu, préfète hors cadre, chargée de mission auprès du défenseur des droits, et conseillère du Gouvernement, dont c’est le second voyage à Mayotte, elle a rencontré les associations qui œuvrent auprès des jeunes, notamment en scolarisant les exclus du système scolaire. Une initiative appréciée, « ils ont d’ailleurs réagi positivement aux propos et orientations du président du conseil départemental ».
Les deux nouveaux délégués territoriaux recevront le public au Conseil départemental de l’accès aux droits, basé au Tribunal de Mamoudzou à Kawéni, et accompagneront les Jeunes Ambassadeurs des droits auprès des enfants qui ont déjà sensibilisé 1.600 enfants à leurs droits.
En fonction depuis un an, Geneviève Avenard voulait s’imprégner de la réalité de l’île, « et apprécier la mobilisation des acteurs et comprendre les absences d’évolution depuis 2012 ». Elle l’assure, toutes les saisines seront traitées, « et si le traitement à l’amiable ne suffit pas, nous délivrons une recommandation de portée générale contre l’administration, qui fera l’objet d’une publication ».
Ainsi, si le Défenseur des droits n’a aucun moyen coercitif, il présente un rapport d’appréciation régulière au Comité des droits des enfants à l’ONU : « la France y sera ainsi entendue en janvier prochain, et pourra se voir imposer des observations publiques. Une partie est d’ailleurs consacrée à Mayotte, notamment sur l’accès aux droits. »
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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