La Journée internationale des violences faites aux femmes était marquée par les portes-ouvertes de l’ACFAV aux autres acteurs et au public, ce mercredi à Mtsapéré. Un contexte qui n’est pas parfaitement connu à Mayotte, pour le directeur de l’ACFAV, qui demande un état des lieux.
« Dis madame, c’est quoi un ‘macho’ ? »… Ce petit garçon de primaire s’adresse du bout de son mètre vingt à Faouzia Cordji, il ne pouvait pas mieux tomber. « Mais attention, je ne suis pas macho ! », précise-t-il alors que celle qui est à l’origine de l’ACFAV, lui décrit l’archétype d’un macho à son âge, « notamment, de ne pas faire son lit parce que ce serait un ‘truc de fille’ ! »
A l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, l’Association pour la Condition Féminine et d’Aide aux Victimes organisait une journée portes-ouvertes à Mtsapéré. Plusieurs acteurs et associations étaient présents, de Solidarité Mayotte, au Centre départemental d’accès aux droits en passant par le CHM ou la gendarmerie.
Tous œuvrent dans l’accompagnement des victimes, certains sont moins connus. Comme l’association « Super Décidé* » de Tsingoni, un nom évocateur, son vice-président Issouf Mohamed, l’est en tout cas : « Depuis deux ans, nous luttons contre toutes les formes de violence. Qui touchent les femmes, mais aussi dans les établissements scolaires. Nous sensibilisons actuellement au collège de Tsingoni parents et enfants, car chacun a sa part, à commencer dans le respect des professeurs. »
Chantage à la carte bleue
L’ACFAV**, c’est 3 services d’accompagnement : l’aide aux femmes victimes de violences conjugales, le point d’info-famille et le service d’hébergement d’urgence qui accueille les femmes en situation de précarité. « Elles sont mises à l’abri pendant 15 jours, pendant lesquels nous les accompagnons pour trouver un logement à leur sortie. » Les différentes permanences sont à Dzoumogné, Majicavo au Centre pénitentiaire, à Kawéni eu TGI, à Pamandzi, à Mtsapéré et à Cavani, depuis lundi, avec l’ouverture d’un accueil de jour en face du Crédit agricole.
Son directeur, Djamel Djalalaine, évoque une évolution dans les formes de violence, « qui sont plus psychologiques, avec des insultes ou du harcèlement. Souvent pour des motifs d’argent, mais pas dans le sens que l’on croit. Si les femmes en situation irrégulière réclament leur pension alimentaire, les mahoraises, de plus en plus autonomes, peuvent être menacées de divorce si elles ne donnent pas leur carte bleue à leur mari. »
« 80% des femmes violentées retournent avec leur conjoint»
Lors de son discours inaugural, il soulignait la nécessité d’obtenir un état des lieux fiable, « on sait que 80% des femmes accueillies retournent avec leur conjoint, mais sans en connaître les raisons exactes, les enfants, la dépendance ? ». Mais aussi, l’accès à une aide juridique, « avec notamment la nécessaire présence d’un référent gendarmerie à l’hôpital », et regrettait que des partenaires de l’ACFAV que devraient être les mairies ne s’investissent pas plus. Pour lui, c’est le premier contact qui va être déterminant, « c’est pourquoi notre équipe part en formation technique. »
Les femmes violentées doivent savoir qu’existe le Centre d’accès aux droits (CDAD) qui les conseille sur leurs recours judiciaires, le dépôt de plainte, l’avocat, l’aide juridictionnelle, etc.
A Solidarité Mayotte, on accueille des femmes demandeurs d’asile, marquées à différents stades par la violence : « du viol dans le pays d’origine, aux violences sur la route de l’exil, à la situation sur place à Mayotte, où tant qu’elles n’ont pas le statut de réfugiée, elles doivent se prostituer pour survivre. »
Une journée qui aura accueillis beaucoup de scolaires, mais les jeunes sont eux aussi touchés, de prés ou de loin : « une petite fille nous a demandé qui elle devait contacter si elle était témoin de violences, sans plus de précisions, » glissaient les gendarmes, présents eux-aussi ce mercredi matin.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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