Un nouvel outil est à la disposition des femmes victimes de violences : un guide d’information listant les différents appuis qu’elle pourrait solliciter. Parce que le nombre de victimes pourrait être bien supérieur à Mayotte. Il pourrait faire des émules en métropole.
Ce guide, c’est Moinaecha Noera Mohamed, Déléguée aux droits des femmes à Mayotte, qui en est à l’initiative, et relayée par le Centre départemental d’accès aux droits (CDAD), présidé par Laurent Sabatier, également président du Tribunal de Grande Instance, et la préfecture.
Un guide pas uniquement destiné à faire connaître leurs droits aux femmes violentées, « mais à la solitude et à l’isolement liée à leur situation, il ne faut pas rajouter l’incompréhension institutionnelle. Plus on a une connaissance fine de ce que fait chaque acteur, mieux on peut accompagner ces femmes », déclare Laurent Sabatier.
C’est donc un guide d’accompagnement global, rédigé en deux langues, français et shimaoré, « et qui a été remarqué par la Délégation de députés de défense des droits des femmes venue à Mayotte en novembre, qui vont sans doute s’en inspirer. »
Un chiffre noir quatre fois supérieur
En 2015, environ 120 plaintes ont été enregistrées à Mayotte, bien inférieur à la moyenne nationale, « car beaucoup n’osent pas déposer plainte, parce qu’elles ne se sentent pas protégées et qu’elles craignent pour elles et leurs enfants. Il est communément admis que le chiffre noir d’écart entre faits signalés et faits constaté est quatre fois supérieur aux statistiques officielles », explique le juge.
Qui rajoute que, pour casser cette tendance, la loi propose maintenant le Mandat global de protection qui permet aux victimes de conserver leurs droits, dont leurs domiciles : « Pendant des années, les femmes victimes devaient quitter leur domicile et étaient accueillies au sein de structures avec leurs enfants. On traitait les effets plutôt que leurs causes. Ce sont les auteurs des violences qui doivent partir, surtout à Mayotte où les femmes sont propriétaires de leur logement. »
Dénoncer des faits dont on est témoin
Guy Fitzer, secrétaire général adjoint de la Préfecture de Mayotte, et sous-préfet en charge de la Cohésion sociale, notait que la société mahoraise, toute matriarcale qu’elle soit, n’est pas une garantie suffisante : « les jeunes filles doivent pouvoir s’exprimer librement et s’épanouir. La honte doit changer de camp. » Et de rappeler qu’en France une femme meurt tous les trois jours sous les coups, « après la condamnation, la vie doit continuer, et c’est là aussi que ce guide va servir en proposant un réseau, assistantes familiales, ACFAV, TAMA, etc. »
3.000 guides viennent d’être publiés, et seront distribués à tous les partenaires susceptibles d’accueillir les femmes, travailleurs sociaux, infirmières, magistrats, etc.
L’environnement a aussi sa place dans la dénonciation de ces faits de violence : « Chacun doit révéler des faits lorsqu’il en a connaissance », invitait Guy Fitzer, « surtout quand la situation est criminelle ».
Une information qui reste encore dans les familles et les villages. Il en va pourtant de la protection d’une personne en danger.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
Comments are closed.