En cette semaine de rentrée scolaire et universitaire, alors que des instituteurs-stagiaires travaillaient sur la liberté d’expression, les étudiants du 1er diplôme «valeurs de la République» entamaient leur 5 mois de formation. Bilan d’étape.
C’était un des événements de la rentrée universitaire de septembre 2015 à Mayotte. Le préfet en personne était venu assister à la mise en place d’une formation inédite dédiées aux valeurs de la République. La création de ce diplôme universitaire (DU) était une des conséquences directe des attentats de janvier, le gouvernement estimant nécessaire de proposer une formation civique et civile dans plusieurs universités de France, dont Mayotte où ce DU est largement contextualisé aux réalités de notre département.
Quatre mois après, ces 37 étudiants particuliers faisaient leur rentrée de janvier, cette semaine, comme l’ensemble des 1270 autres étudiants du CUFR. «Etudiants particuliers» car on n’y trouve que des hommes qui sont cadis, secrétaires greffiers ou aumôniers travaillant dans les prisons, à l’hôpital ou à l’armée. «Une première chose frappante est leur volonté d’être assidus», s’enthousiasme Aurélien Siri, maître de conférence et responsable de département à Dembéni. Ces étudiants viennent réellement suivre les cours et ils semblent satisfaits de cette formation.
Satisfaction partagée
«A l’heure actuelle, les motifs de satisfactions sont partagés. Le cadis et les secrétaires greffiers nous disent régulièrement que la formation leur plaît. Ils sont même exigeants. Et pour les enseignants, les échanges qu’ils ont pu avoir sont aussi très intéressants.»
Ces enseignants sont très variés à l’image du contenu d’une formation qu’il a fallu totalement inventer. Professionnels comme des magistrats du tribunal de grande instance de Mayotte (TGI), professeurs agrégés ou maîtres de conférence de métropole, ils se répartissent dans 7 modules : «Sensibilisation à la culture du monde arabe», «histoire et statut de Mayotte», «le statut civil de droit local», «libertés fondamentales et droit des religions», «la laïcité», «les géopolitiques de l’islam».
«Nous avons également un module de Français langue étrangère et un formation d’arabe qui est assurée par un professeur de langue arabe du lycée de Sada. Des cadis nous ont dit qu’ils avaient besoin de ces cours car ils sont loin d’avoir tous le même niveau», relève Aurélien Siri.
Des cadis médiateurs
Ces 37 étudiants sont répartis en deux groupes en fonction de leur niveau. Certains avaient besoin d’une remise à niveau en français pour ensuite rejoindre la formation classique qui se fait en deux ans avec l’idée de donner et de renforcer des connaissance et de donner un autre point de vue historique, théologique pour qu’ensuite, la pratique de l’islam se fasse dans les meilleurs conditions.
«Transmettre ces connaissances correspond aussi à la volonté de donner un nouveau rôle aux cadis dans la médiation sociale». Un diplôme utile dont on ne sait pas encore si, au fil du temps, il ne deviendrait pas obligatoire intégrer des missions en particuliers pour les aumoniers de prison. Rien n’est encore tranché. «C’est vrai que la création de ce DU vient à la suite du dialogue avec les cultes initié par le gouvernement après les attentats mais, chez nous, la proposition était déjà portée dans le document ‘Mayotte 2025’», remarque Aurélien Siri.
Une formation qui pourrait être maintenue
A Mayotte, la première année n’est pas encore achevée que l’on sent la nécessité de maintenir ce diplôme à l’issue des deux ans. «Nous avons reçus des candidatures spontanées de personnes qui veulent intégrer cette formation. Et même lorsqu’on regarde le public ciblé aujourd’hui par ce DU, il y a toujours de nouveaux greffiers, de nouveaux cadis… Il a donc probablement vocation à être maintenu», même si les enseignements ne seront peut-être pas aussi complets. «Nous avons eu une grande latitude pour ce premier diplôme, il a fallu tout inventer. Nous avons choisi d’étudier beaucoup de domaines et si ce DU est maintenu, peut-être y aura-t-il une volonté d’harmonisation entre les enseignements des différentes universités».
En attendant, les étudiants de Mayotte ont commencé à bénéficier de conférences thématiques autour de l’islam : dans la justice française, le milieu carcéral, dans la ville, au travail, l’islam et la famille ou encore l’islam et la santé, 21 heures de réflexions approfondies sur des sujets qui permettent de faire le lien entre un enseignement culturel et les questions plus concrètes du quotidien.
RR
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