Celui qui commande le Service militaire adapté à Paris depuis le 1er août dernier se rend dans chacune de ses collectivités, Guyane, Martinique, Guadeloupe, Polynésie, Nouvelle-Calédonie et La Réunion. Elles participent toutes au programme mis en place en 2010, le « SMA 6000 », censé accueillir 6.000 jeunes par an.
A Mayotte, ils étaient 513 volontaires-stagiaires à apprendre un métier sous les drapeaux en 2015, ils seront 533 dans le cadre de cette montée en puissance. La rigueur militaire rattrape ceux qui ne savaient pas trop à quel destin se vouer : « Nous allons au delà de notre mission d’accueil de 60% de jeunes sans aucun diplôme et de 30% d’illettrés puisqu’ils étaient 44% l’année dernière à Mayotte », souligne le général de Revel.
Un choix bénéfique que celui du BSMA de Mayotte, puisque son taux d’insertion est le plus élevé des SMA, « 86%, dont la moitié est inséré dans l’emploi », précise le chef de corps Christian Carrère. Un exploit au regard du niveau initial des jeunes et de l’état du marché de l’emploi. A mettre en lien avec “l’implication de nos cadres pour démarcher”. Les autres partent en poursuite de formation, sur place ou en métropole avec LADOM.
La filière aquacole en danger
Les stagiaires du BSMA ont la côte auprès des entreprises pour la rigueur militaire acquise au cours de leur formation, qu’ils peuvent perdre ensuite aussi vite, « nous arrivons malgré tout à les suivre jusqu’à 6 mois après leur départ. » Surtout, un travail est en cours pour faire reconnaître les diplômes made SMA comme le CAPI (Certificat d’Aptitude professionnelle d’Insertion) ou le CFG (Certificat de Formation Générale), comme unités de valeur dans les processus de formation professionnelles, une sorte de continuité post BSMA.
Une coopération est finalisée avec le Pôle emploi, encouragé par la ministre Pau-Langevin, « et nous étudions une possible insertion dans le circuit CFA de formation des apprentis. »
Actuellement 21 filières de formation sont proposées. Certaines, comme l’agriculture, ont fermé, faute de débouchés, et la filière aquacole étant en difficulté à Mayotte (le Schéma de développement de l’aquaculture n’est toujours pas produit), les militaires s’interrogent sur sa reconduction en 2016 : « Tout dépend de la reprise ou non de l’écloserie qui fournit notre installation de Mliha en alevins. Le SMA ne peut pas être un expérimentateur de filières professionnelles ! », tranche le général. Il en va de même pour le tourisme ou la pêche : « Il faut des employeurs derrière. »
François Hollande s’inspire du SMA
Les filières porteuses sont le BTP et le tertiaire comme les agents magasiniers, les agents techniques de vente, à forts débouchés. Deux nouveautés sont à l’étude : les agents loisirs et sports, et les agents d’entretien du bâtiment, « à la fois plaquistes, peintres ou carreleurs, de vrais couteaux suisses ! » Et pourquoi pas un jour une filière numérique.
La concurrence de la main d’œuvre étrangère sur les chantiers du BTP ne doit pas être un frein pour le militaire : « Nos jeunes doivent offrir une plus-value, et permettent à l’entrepreneur de bénéficier de dispositifs de l’aide à l’embauche. »
Il n’y a qu’à poser la question aux jeunes déscolarisés, et le Chef d’Etat major comme le chef de corps l’affirment : « Le taux d’attractivité du bataillon est fort, nous recrutons les deux tiers de ceux qui se présentent, qui remplissent donc les critères. » Notamment de nationalité française.
La visite du BSMA de Mayotte avait conforté le président Hollande sur la pertinence de la structure pour l’insertion des jeunes. S’il reconnaissait un coût de formation élevé, 12,5 millions d’euros à Mayotte, son taux de réussite plaidait au développement des SMA. Le système a été décliné en Service militaire volontaire (SMV), dépendant du budget du ministère de la défense, et non des Outre-mer comme les SMA. Les 3 SMV devrait bénéficier à 1.000 jeunes sur les deux ans, « et on peut penser qu’il sera élargi », remarque le général de Revel.
Le SMA aussi d’ailleurs dont le projet des « 6000 » arrive à son terme l’année prochaine, « qui connaîtra également une échéance politique importante. Nous sommes donc sur l’après 2017 pour étudier la prochaine phase de développement », conclut le général de Revel.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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