« Même si on parle de solidarité à Mayotte, tout le monde travaille ou a des occupations, souvent jusqu’en métropole, et n’a plus de temps à consacrer à leurs aînés »… Celui qui fait ce constat est infirmier libéral, à la suite de ses études à l’IFSI Mayotte.
Après deux ans passés au CHM, Mirhane Abdallah a créé en 2013 son cabinet d’infirmier Hamsine, de soins à domicile. Face aux difficultés rencontrées par ses patients, personnes âgées ou en situation de handicap, dont l’isolement, il a décidé de réagir. Il envisage un temps monter une EPHAD, une maison de retraite, mais la juge inadaptée au contexte local.
Si la proportion de personne âgée à Mayotte est faible au regard des autres territoires, 4,2% ont plus de 60 ans, elle ne va faire que s’accroitre, au fur et à mesure du vieillissement des 55% de moins de 20 ans de l’île, et du rallongement de l’espérance de vie.
C’est la rencontre avec Jacques Lombardi, Directeur du Centre communal d’action sociale (CCAS) de Saint-Pierre à La Réunion, venu à Mayotte mettre en place un CCAS, qui l’aidera à structurer son projet. Il se lance et créée la société Dagoni Services*, en décembre 2015.
Elle oriente son action vers l’adaptation au vieillissement et au handicap, notamment par la recherche de modes d’accueil adaptés, le soutien et l’accompagnement à domicile dans les actes de la vie quotidienne, la prévention de la perte d’autonomie notamment en tentant de maintenir le lien social, et l’information pour l’accès aux droits.
C’est aussi l’opportunité pour lui de répondre à un appel à projet d’un SPASAD, lancé par le conseil départemental et annoncé par le conseiller en charge de l’action sociale Issa Issa Abdou. Un Service polyvalent d’aide et de soins à domicile de 57 places, dont 40 allouées aux personnes âgées et 17 au handicap, « nous attendons la réponse. » Le SPASAD proposera deux services, « celui de soins infirmiers à domicile, et un autre de soins d’accompagnement. »
500 bénéficiaires potentiels de l’APA
Pour lancer complètement son activité, il lui manque l’agrément pour proposer des services mandataires, « il y a blocage.» Dans le cadre d’une offre de services mandataires, c’est la personne âgée ou en situation de handicap qui devient l’employeur, et qui rémunère la prestation. Il faut pour cela qu’elle perçoive l’Allocation personnalisée d’autonomie.
Le conseil départemental a pris du retard après la parution du décret de l’APA fin octobre, mais Issa Issa Abdou nous indique que les 500 personnes âgées ou en situation de handicap sont bien éligibles depuis le 1er janvier 2016. Il devrait donc y avoir rétroactivité.
Et Mirhane Abdallah a reçu un appui de taille dans ce dossier, puisqu’il est accompagné de Chrystel de Bricourt, chef d’entreprise à la tête de Oazure Villa Maurice, et membre active du CJD, le Centre des jeunes dirigeants, représenté à Mayotte par Mohamed Assani Abdou.
Une entreprise qui s’annonce sociale et solidaire
C’est le CJD qui l’a d’ailleurs parrainé pour créer un site internet et une page Facebook, et mettre en place un service informatique de gestion d’entreprise.
Dagoni services c’est son bébé, «j’y ai mis 10.000 euros de fonds propre», parce qu’il a découvert, trop tard, qu’il aurait pu bénéficier d’aide à la création d’entreprise.
Une autre voie s’ouvre pour lui : celle initiée par l’ordonnance présentée en conseil des ministres sur l’application à Mayotte de la loi sur l’Economie sociale et solidaire, où les services à la personne sont rois. Notre département est en attente du décret pour les modalités d’application.
Mirhane Abdallah, également connu comme “Gaz”, membre de l’élite des arbitres de football locaux et de l’océan Indien, est prêt à entrer dans la partie, qui aura besoin d’acteurs opérationnels, «pour le SPASAD, il faut l’être au 30 juin 2016.»
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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