A la question de l’arbitrage qu’il comptait mettre en place pour régler le budget du conseil départemental, le préfet de Mayotte nous avait répondu la semaine dernière appliquer stricto sensu les recommandations de la Chambre régionale des Comptes : « Nous sommes en train d’examiner la situation avec les équipes du Conseil départemental. Mais ma marge de manœuvre est extrêmement encadrée par la loi puisque je dois respecter l’équilibre budgétaire d’ensemble dégagé par la Chambre régionale des comptes et si je m’écarte de ses préconisations, je dois le motiver. » Un sujet qu’il va certainement évoquer avec la ministre Pau-Langevin lors de son entrevue mercredi 31 août à Paris.
Il n’aura donc visiblement d’autres alternatives que de contenir la masse salariale et de geler l’indexation des salaires. Ces deux conseils de la Chambre, le président Soibahadine n’avait pas voulu les appliquer, « sur quels critères devrais-je licencier des agents ? », nous avait-il interpellé, « et si je n’applique pas le rattrapage de l’indexation, je me heurte à une grogne sociale de la part des agents. »
La matière grise agonise
Le préfet va donc faire le sale boulot, alors que se profile le mouvement social craint par le président du département. Regroupé en Intersyndicale CFDT, CGT Ma, CCCGT, Sud CT, et rejoint par FO, les agents annoncent un mouvement de grève pour ce 5 septembre.
Les points de revendications sont multiples, avec en toile de fond la crainte de voir les préconisations de la Chambre devenir réalité. « L’indexation de la rémunération des contractuels a déjà été bloquée. Une quarantaine d’entre eux est concernée. »
Ils reprochent aussi aux exécutifs successifs une gestion clientéliste de la masse salariale, « le recrutement de proches engendre des dégâts collatéraux, et notamment un déficit de production administrative, ajouté à un manque de rigueur. La matière grise agonise au conseil départemental, car les gens sont mis au placard. Et beaucoup de recrutements ont été faits par cet exécutif. Des contrats de 6 mois, et qui sont déjà en congé maternité…»
Les engagements de Manuel Valls attendus
Une partialité qui toucherait aussi le gel des carrières, « depuis 2012, l’administration n’organise pas de commission paritaire pour faire évoluer les carrières des agents », s’ensuit une démotivation.
Leur porte-parole, Allaoui Askandari, demande aussi la prise en charge de la mutuelle, la mise en place des œuvres sociales permettant de profiter notamment de tickets restaurant, la validation d’un plan de formation.
Il rappelle au préfet ses marges d’actions, qui ont déjà fait l’objet d’un échange la semaine dernière entre Frédéric Veau et le président Soibahadine Ibrahim Ramadani. Elles reposent sur les engagements du premier ministre évaluant à 50 millions d’euros la dette de l’Etat envers le département. Et si le ministère des Outre-mer s’était voulu rassurant en juin, indiquant que les services y travaillait, le sujet revient en urgence sur le tapis au moment de faire des coupes sombres.
« D’autres marges de manœuvre existent, comme l’accélération des titrisations », poursuit Askandari Allaoui, qui évoque ces terrains, sur lesquels le département paie injustement des impôts, « 1 à 2 millions d’euros par an, alors que le principe d’acquisition de ces parcelles au profit de l’occupant est acquis. »
Des échanges ont eu lieu entre les agents et l’équipe dirigeant au conseil départemental, « sans évoquer les points de revendication ». Les agents ne descendront pas dans la rue, « nous allons fermer nos bureaux et organiser des ateliers de réflexion ».
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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