« Nous avons abordé les mêmes thèmes que lors des réunions préfectorales », déclarait un maire d’un air las à l’issue de la rencontre, alors qu’Anchya Bamana, maire LR de Sada, se réjouissait « d’avoir au moins été écoutée. ». Une réunion à laquelle la presse n’a pas été conviée, mais dont les priorités tournaient autour des finances communales, des rythmes scolaires, de la sécurité, ainsi que de l’ajustement des taux des impôts fonciers.
Outre le bouclage de leur budget, la priorité des maires est d’assurer la sécurité de leurs communes. Le Plan Cazeneuve était donc décliné par le préfet Frédéric Veau, enrichi des annonces matinales sur la lutte contre l’immigration clandestine. Nous en sommes donc à des renforts de 88 en gendarmes, « dont 41 mobiles arriveront en novembre, ajoutés aux 30 agents du GIGN, et 17 dans les brigades », de 14 pour le Groupement de sécurité de proximité, et de 26 adjoints de sécurité. « Chaque mairie doit désigner un référent sécurité », rappelait Ericka Bareigts.
La coordination entre les services est désormais actée, mais les maires font remonter leurs difficultés : « Au cours des CLSPD, souvent, on fait semblant », relate le maire de Chiconi, « on nous donne une enveloppe inférieure à nos besoins, donc on saupoudre. »
Octroi de mer en suspend
Pour abonder leur budget précisément, la compensation des compétences transférées aux communes « est en décrochage par rapport à la pression démographique », convient Ericka Bareigts, qui annonce qu’ « un coefficient directeur des résultats du recensement sera intégré dans le calcul de la dotation global de fonctionnement ». Mais selon un élu, ce coefficient est déjà effectif, « c’est pourquoi nous demandons précisément un recensement annuel, et non tous les 5 ans comme c’est le cas. »
L’ensemble des engagements de l’Etat qu’elle aura rappelé aux maires, les 50 millions d’euros et les 10 millions pour respectivement le second et le premier degrés, les 50 millions d’euros des 10 engagements de Manuel Valls, font partie des acquis et ne sont pas de nouvelles annonces. Avec un bémol : la répartition de l’octroi de mer, promise aux communes par le premier ministre avec un étalement sur trois ans, est soumise à un accord du Conseil Constitutionnel fin octobre.
Les rythmes scolaires furent évoqués, avec une charge qui, malgré les 90 euros versés par élèves, s’avère impossible pour certaines communes qui doivent mettre sur pied un système complet de cantines, et d’activités périscolaires. La Confédération syndicale des familles de Mayotte a été reçue à ce sujet par les conseillers de la ministre : « Nos enfants mangent par terre, travaillent à l’heure de faire la sieste. Nous ne sommes pas contre la réforme, mais elle est impossible dans les écoles en rotation. Si rien ne s’améliore, nous fermerons les écoles comme à Bouéni », rapportaient-ils devant les médias.
« Une valeur locative insoutenable »
La réduction du millefeuille administratif chère au gouvernement n’est pas encore opérationnelle à Mayotte où deux intercommunalités, celles du nord et du sud, peinent à se former, des problèmes qui doivent se résoudre « par le dialogue, dans la coconstruction », implore la ministre. Le préfet devrait à ce sujet réunir la commission départementale de coopération intercommunale.
Les impôts locaux, relevés de manière outrancière par certains maires pour équilibrer leurs budgets, ont été abordés, un sujet sur lequel Ericka Bareigts s’engage personnellement, « tout le monde est d’accord sur votre valeur locative insoutenable. Je travaillerai à la recherche d’une solution. »
On n’en entendait plus parler, mais l’Observatoire des prix s’invitait au débat, notamment sur les montants des marchés : « Nous attendons leur étude pour Mayotte et la Guyane. Les coûts des matériaux semblent trop élevés, nous avons besoin de transparence. »
Décoré pour sa persévérance
Une dernière question était posée sur la coopération avec les Comores, à la ministre réunionnaise : « Une mission Réunionnaise s’y est rendu avec le préfet de Mayotte, mais sans les élus ! ». La réponse fusera, très politique, « c’est une initiative du président de la région Réunion (le LR Didier Robert, ndlr) qui a choisi de bafouer les élus de Mayotte », avant d’élargir le débat sur la coopération régionale, « qui doit aussi se faire à l’international, en incluant le Mozambique, l’Inde et la Chine. » De leurs côtés, les élus ne se rendent pas sur ces missions aux Comores lorsqu’ils y sont conviés…
La rencontre s’est soldée par la remise de la médaille de Chevalier de la Légion d’Honneur à un renard de la politique, le président de l’association des maires Saïd Omar Oili, au sein d’une Case Rocher pleine à craquer : « Je récompense un homme au service d’une population et d’un idéal », déclarait Ericka Bareigts, sans cacher son émotion. Après avoir entendu résumer son parcours d’enseignant, de militant et de politique, l’élu prenait la parole pour évoquer ses valeurs familiales, s’exprimer sur sa méthode « privilégier le point d’équilibre au rapport de force », et citer Goethe : « Celui qui persévère et n’épargne pas sa peine, sera gracié », pour le paraphraser, « celui qui persévère et n’épargne pas sa peine, sera décoré. »
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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