L’objectif n’était pas de provoquer, mais de lancer le débat sur la coopération régionale sans se priver de la présence de nos plus proches voisins, avait jugé Hanima Ibrahima (Roukia Lahadji), présidente de l’Association des collectivités d’Outre-mer en Congrès jusqu’à hier à Mayotte. « Il faut travailler ensemble, sans avoir peur désormais d’un retour dans le giron comorien », s’est-elle évertuée à répéter face à la polémique suscitée par certains habitants, dont le collectif du sud.
En témoignent les pancartes brandies à la sortie du dernier atelier devant la mairie de Mamoudzou, demandant de « respecter le choix des Mahorais. » La petite délégation comorienne ne veut pas polémiquer, « nous avons les mêmes chez nous ! », fait remarquer tranquillement Mustapha Chamsoudine, dit « Dada », maire de Moroni (Grande Comore), « nous sommes venus parce que nous étions invités à parler de coopération régionale. C’est un premier pas de dialogue avec les élus de Mayotte », souligne-t-il.
Dépassionner le débat des deux côtés
Un sacré pas même, puisqu’en venant, ils savaient qu’ils allaient entendre parler de politiques publiques, de lois NOTRe et Egalité réelle, bref de l’ancrage de Mayotte dans la République Française. Justement, un sujet qu’ils ne veulent pas aborder, sous aucun angle, si ce n’est l’espoir de voir revenir un jour l’indisciplinée Mayotte dans leur giron.
Une coopération régionale difficile donc, avec ce sujet sous-jacent lors de la moindre phrase. L’interview ressemble alors à du sans-filet avec la volonté de rester en équilibre sur le fil. Et qui peut rendre impossible toute avancée si on ne met pas de côté la géopolitique lors des discussions. Il en convient : « Je suis sûr que nous franchirons un jour les barrières de la coopération régionale. » La débuter par La Réunion nous semble une bonne solution, comme cela s’est fait il y a quelques semaines.
Pourtant certaines entreprises travaillent des deux côtés du bras de mer, à cheval entre Mayotte et Grande Comore, non sans problème d’obtention des visas, et freinées par les coûts de l’aérien, comme ce fut souligné dans l’atelier : « Il faut assouplir et regarder de prés les billets : 400 euros pour un Moroni-Dzaoudzi, quand le Paris-Réunion coute le même prix », relève « Dada ».
Il est d’accord, il faut dépassionner le débat, « mais des deux côtés », prévient-il, « nous devons lutter contre toute forme d’extrémisme, à Mayotte comme chez nous. » Il considère que leur déplacement est véritablement le début d’un dialogue, « donc une richesse pour tout le monde. »
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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