« Des soignants non soignés », « La radio est sous tension », « la chirurgie se noie » ou « Nous sommes irradiés par la suractivité » : le personnel hospitalier avait choisi de dénoncer leur surcharge de travail en faisant dans l’humour, pour ce 1er jour de grève au CHM. Dans l’humour, mais pas dans la décontraction, car ils sont remontés contre leur direction : « Nous devions recevoir une synthèses des échanges actés ces derniers jours, mais nous n’avons rien eu ! On se moque du dialogue social ! »
La rue qui part de la SMAE pour descendre vers la mairie de Mamoudzou est bloquée au niveau de l’hôpital par un barrage mis en place par les grévistes de la CFDT. Syndicat représenté à 36% au CHM, il n’est pas suivi par la CGT Ma et FO.
Balahachi Ousseni, le secrétaire général de la CFDT, mais aussi représentant du personnel du CHM et membre du Comité technique d’établissement, revient sur les raisons de ce préavis de grève illimité : « Nous demandons l’annulation de la nouvelle réorganisation des services, à travers laquelle la direction déplace les agents en fonction des besoins. Nous avons demandé un état des lieux des effectifs dans les services et recrutement, mais nous ne l’avons pas obtenu, en dépit des engagements de la direction. »
Les urgentistes de l’EPRUS, un cache-misère
Il pointe du doigt ceux qu’il appelle les « lépreux », le personnel EPRUS (Etablissement de Préparation et de Réponses aux Urgences sanitaires) qui vient en appui de l’insuffisance d’urgentistes, en raison de l’explosion de l’activité du CHM. C’est une réserve sanitaire qui intervient comme son nom l’indique en cas d’urgence, mais non de manière permanente dans un département français, comme c’est pourtant le cas depuis plusieurs années à Mayotte. Faute d’avoir su véritablement régler les problèmes.
« Je les nomme ‘lépreux’ parce qu’ils sont en marge d’un système de santé normal. Ils sont de passage, nourris, logés, bénéficient de véhicules et d’indemnités faramineuses, et repartent le lendemain, sans que rien ne soit solutionné. » Un cache-misère dont ne veut plus Balahachi Ousseni qui demande un programme de développement d’offre de soins « digne de ce nom », avec « des effectifs à la hauteur des besoins.
A la suite du dépôt du préavis, la nouvelle directrice, Catherine Barbezieux, ancienne directrice adjointe, qui a donc succédé à Etienne Morel, avait proposé et participé à deux rencontre la semaine dernière, la dernière avait duré 4 heures. « Elle s’était engagée à fournir une synthèse de cette réunion avec les avancées touchant notamment la réorganisation du personnel, mais nous n’avons rien reçu. » Une prime leur a déjà été proposée pour prendre en compte les conditions de travail difficile, « mais nous voulons avant tout des mesures en personnel à la hauteur des besoins », lance une gréviste.
Un mail tardif
Si la grève prend effet aujourd’hui, ce n’est pas un hasard, « nous voulons marquer le coup au moment du changement de direction, et ne pas rester en observateur comme cela a été trop souvent le cas par le passé », appuie Balahachi Ousseni.
Une partie des troupes est donc montée vers le bâtiment où siège la direction du CHM. Si Catherine Barbezieux est sortie de son bureau, les échanges se sont difficilement noués, la tension était vive du côté des syndicalistes : « On vous demande un vrai dialogue social. »
Prenant le micro, la directrice, qui n’a pas voulu être photographiée par les médias, informait qu’elle s’était fait « un point d’honneur à produire un compte-rendu exhaustif, qui a bien été envoyé par mail à 18h ce vendredi ». Ce qui eu pour effet de faire monter la tension d’un cran, « à une heure où nous ne sommes plus devant nos ordinateurs. Nous sommes fatigués de ces méthodes ! »
Quelques échanges plus tard, syndicalistes et direction sont tombés d’accord sur une rencontre ce mardi. « En attendant, la route reste bloquée », nous informait Balahache Ousseni.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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