C’est à plus de 40 ans que Madi Toiouilou a décidé de retourner à l’école. Un engagement sur deux ans qu’il n’a pas pris à la légère. Cet ancien médiateur de réussite scolaire était en 2015 encore en Métropole. «J’ai décidé de m’installer à Mayotte, l’année dernière. J’avais un besoin de me ressourcer, d’être proche des miens. Quand je suis revenu, je suis devenu contractuel, dans l’enseignement. J’ai passé le concours. Je l’ai réussi et je suis là. C’était important pour moi, j’avais un besoin de transmettre, d’être définitivement un enseignant titulaire».
Comme lui, plus de 500 personnes ont passé le concours de professeurs des écoles, en avril dernier. 135 ont réussi les épreuves écrites et orales, constituant ainsi cette toute première promotion. Parmi elle, des étudiants qui viennent de Métropole, des métropolitains installés sur le territoire, mais surtout des Mahorais, qui avaient déjà un niveau Bac+3 ou qui ont tout simplement validé leur licence au Centre universitaire.
L’ESPE de La Réunion en renfort
«Cette formation répond à un besoin fort, identifié sur l’île. Notre objectif est de former au mieux nos étudiants», indique Aurélien Siri, directeur du Centre Universitaire de Formation et de Recherche de Mayotte (CUFR). «C’est un moment historique pour le CUFR. Nous avons recruté de nouveaux enseignants pour cette formation. Une partie de l’enseignement sera en présentiel, sinon ce sera sur le terrain, dans les écoles. C’est un partenariat avec l’université et l’ESPE de la Réunion, le vice-rectorat et le CUFR».
D’ailleurs pour cette rentrée scolaire particulière, le directeur de l’École Supérieure du Professorat et de l’Éducation de la Réunion a fait le déplacement. Frédéric Tupin était présent pour répondre aux nombreuses questions des fonctionnaires stagiaires. Il délivrera un cours quelques heures plus tard sur la contextualisation.
«Il s’agit de tenir compte des éléments, des caractéristiques de la société mahoraise. On ne peut pas enseigner à Mayotte comme on enseigne à Paris, à Tourcoing, ou même à La Réunion. Il faut installer une réflexion professionnelle, qui consiste à tenir compte des enfants que l’on a face à soi. Il faut tenir compte de leurs conditions de vie, de la langue parlée à la maison. Il faut savoir si leurs parents sont lecteurs ou pas… Si l’on ne contextualise pas dans ce genre de situation, c’est un coup d’épée dans l’eau que l’on donne».
Futurs professeurs des écoles
L’ ESPE de La Réunion est un partenaire privilégié qui a accompagné ce projet depuis ces débuts. «C’était un pari que l’on a fait», précise Frédéric Tupin. «Un pari que l’on obtiendrait de l’État la mise en place d’un concours niveau licence, qu’on aurait beaucoup de candidats, beaucoup de candidats locaux, que le niveau serait bon, et qu’on arriverait à travailler ensemble, le vice-rectorat, le CUFR et l’ESPE de La Réunion. Aujourd’hui, c’est l’accomplissement de tous ces paris. C’est très émouvant.»
La journée de rentrée de mardi aura permis aux étudiants d’échanger et d’obtenir des informations à certaines interrogations, notamment sur la question de la rémunération. En tant que fonctionnaires stagiaires, ceux-ci sont rémunérés de la même manière qu’un professeur des écoles en début de carrière, non indexé. En attendant, ceux qui seront dans 2 ans, la première promotion de diplômés «professeurs des écoles» du CUFR ont l’assurance d’être titularisés dès l’obtention de leurs diplômes, un gage de sécurité non négligeable.
Abby Saïd Adinani
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