La conseillère départementale Soihirat El Hadad qui ouvrait ce mardi 4 septembre ces trois journées d’élaboration du Plan Régional de prévention et de gestion des déchets l’a annoncé en préambule : « Rien ne se fera sans les acteurs de la collecte et du traitement des déchets ». Or, ils étaient seulement une vingtaine dans l’hémicycle ce mardi matin. Pendant ce temps, au même moment, les déchets croupissaient aux Hauts Vallons, en face de ce qui sera le siège de Mayotte la 1ère, et un peu plus loin, jonchaient la plage de Majicavo Koropa, faute de les avoir éradiqué sur les hauteurs, le JDM était allé à la source.
Le PRPGD est un document stratégique de cadrage qui définit les grandes orientations, pour Mayotte, concernant la gestion de tous les déchets, ménagers, dangereux, non dangereux, déchets inertes. Il fixe les objectifs et les grandes orientations à 6 et à 12 ans sur la prévention, la collecte, la valorisation et le traitement de ces déchets ainsi que les actions et les moyens à mettre en place pour les atteindre. Ce Plan ne se substitue donc pas aux actions des acteurs mais doit être élaboré en concertation avec eux.
Problème : la réalité mahoraise ne colle pas aux exigences nationales et européennes, comme l’expliquait Grégory Autrand, du bureau d’étude GIRUS mandaté par le conseil départemental : « Une réduction de 10% des déchets était demandée en France en 2010 quand ici on assiste à une indispensable montée en puissance de la collecte, et alors qu’il n’y avait pas à cette date de pesée des déchets à Mayotte ». A cette époque, les décharges à ciel ouvert envoyaient encore leur fumée dans l’atmosphère. En revenant de très loin, et allant trop vite, on ne s’assure plus du b.a.-ba qu’est le simple ramassage des déchets, partout.
10% seulement des déchets du BTP pris en charge
Les données sur les déchets dangereux, « à 60% hospitaliers », ne sont pas actualisées, et il n’y en a pas pour le secteur du BTP, faute d’organisme représentatif, « la Fédération Mahoraise du BTP couvre moins de 10% de la profession », 10% c’est d’ailleurs la proportion des déchets traitée dans des filières formelles. Ils sont pourtant estimés à prés de 800.000 tonnes, 12 fois plus que le volume entrant à l’ISDND ! Le manque de foncier a été identifié comme un frein pour des projets de valorisation et stockage des déchets du BTP.
La gestion des déchets, déléguée au SIDEVAM 976 est très critiquée par les collectivités, puisque sur les quatre Intercommunalités membres, certaines veulent reprendre leur compétence de collecte.
Le volume d’ordures ménagères est de 210 kg par habitant et par an à Mayotte, contre 260 kg en métropole et 320 kg au Antilles. Non pas qu’à Mayotte on réduise le volume de nos déchets, mais parce que la collecte y est moins performante. Une fois triés, ce sont 60.220 tonnes de déchets qui arrivent dans l’Installations de Stockage de Déchets Non Dangereux de Dzoumogné (ISDND), dont 88% sont des Ordures ménagères.
Aucune des 8 déchetteries promises
En matière de tri, on ne part pas de rien, puisque les tricolores Tri-O tendent les bras à vos verre, plastique et métal, « le carton et le papier le seront d’ici la fin de l’année 2018 ». Mais il faudrait comme en métropole des systèmes de bacs individuels dédiés aux ménages. « Il y a une grosse marge de progression, nous ne collectons que 0,6kg par habitant et par an d’emballages plastique et métal, contre 78kg de moyenne nationale. Mais quand le tri est fait, il est bien fait, il n’y a que 12% qui sont refusés. » Il n’y a pas non plus de filière locale de recyclage des déchets électroniques et électriques D3E, qui sont exportés en métropole, et si les municipalités ne sont pas particulièrement réactives sur l’enlèvement des carcasses de voitures, c’est que la société ENZO n’était plus agréée pour les traiter (c’est en cours).
Pas de déchetterie, ce qui pose un problème en matière d’environnement, les encombrants étant encore balancés dans la nature. Une promesse pourtant sans cesse réitérée, « elles étaient 8 prévues au PEDMA », le Plan d’Elimination des Déchets Ménagers et Assimilés, rappelle Gregory Autrand.
Ces Plans donnent donc des directives générales, et permettent d’obtenir ensuite des financements, mais ne sont efficaces que si l’on s’en sert. Les élus concernés sont-ils animés d’une volonté de voir le sable ou la verdure à la place des déchets ?
Huit enjeux prioritaires ont été définis au regard de cet état des lieux : Nécessité de structurer la filière déchets du BTP, Augmentation des performances des collectes sélectives : emballage, verre, papier, Déploiement du maillage des déchèteries, des plateformes de valorisation des déchets verts (en priorité sur Petite-Terre au regard des tonnages forts et coûts très élevés de transfert) et des projets privés permettant la valorisation matières des déchets d’activité (inertes, ferrailles, cartons, encombrants, … etc.), Organiser la filière biodéchets et déchets verts de la prévention au traitement, Nécessité de connaitre et suivre les déchets et les pratiques et filière (création d’un Observatoire des déchets), Meilleurs captages des déchets dangereux, Valorisation des boues des station d’épuration, Sensibilisation de la population (prévention, geste de tri, prochainement sur les déchèteries…).
Le Plan sera bâti autour de ces enjeux.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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