Ils étaient une petite vingtaine à entrer dans la salle de réunion sur les 220 pompiers professionnels et les 300 volontaires de l’île, « certains voudraient être présents, mais ils sont en service ». Les agents présents sont tous vent-debout contre le rapport d’observation rédigé par le directeur du Service Départemental d’Incendie et de Secours (SDIS), le colonel Fabrice Terrien : « Il y dénonce un manque de compétence, de technicité, et l’a d’abord présenté aux élus du Département, pour ensuite nous en parler. Nous n’avons pas été associés. »
Ils regrettent aussi que les revendications internes n’aient pas été portées, « alors que nous rencontrons régulièrement le directeur » : « Nous demandons depuis longtemps la mise en place d’une mutuelle, comme dans tous les SDIS, de l’Indemnité d’administration et de technicité qui n’est pas obligatoire mais activée dans les cas de forte pénibilité de travail, nous portons des tenues alors qu’il fait souvent prés de 40°, la sécurisation des caserne. Et l’activation du CHSCT. » Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est une institution représentative du personnel au sein de l’entreprise ou de l’administration publique.
Des bouches à incendie muettes
Abdoul Karim Ahmed Allaoui et ses collègues réagissent vivement quand nous leur faisons part de dysfonctionnements actuels ou passés, notamment sur l’absence d’eau lors d’intervention : « C’est impossible ! Celui qui ferait ça serait viré. C’est plutôt un problème de pression en sortie de bouche à incendie, ou leur nombre insuffisant ». Quant aux retards dont ils sont souvent accusés sur les interventions, le colonel Terrien nous avait détaillé la chaîne de communication, avec un passage par le CHM, potentiellement source de retards.
Nous sommes montés à l’étage, pour avoir la réaction de celui qui dirige le service depuis quelques mois. Sur le rapport « d’étonnement et d’orientation » qui alimente la discorde, le colonel explique qu’il l’a transmis au préfet, pour le champ opérationnel, et à la présidente du SDIS, la conseillère Moinécha Soumaïla, pour la gestion administrative et financière. « Il décrit le fonctionnement du service selon 4 axes : les ressources humaines, les moyens opérationnels, l’immobilier et le pilotage-gouvernance. Il avance des pistes de progrès pour aller vers plus d’efficacité ».
Instance de dialogue social le 13 mars
Il explique que le document a été élaboré avec les cadres du service ainsi que tous les chefs de centres, « j’y ai déjeuné plusieurs fois depuis 5 mois, pour passer du temps avec les agents, et comprendre ce qui n’allait pas. » Sur sa publication, il explique avoir suivi le process habituel, en commençant par les élus, puis en informant le personnel. « Par contre, j’ai communiqué auprès des agents sur la lette de mission que le préfet et la présidente m’ont adressée. »
Un document avec des termes sans doute maladroits, puisqu’on y parle de « forces spéciales » quand il s’agit de lancer une coopération avec d’autres SDIS dont des cadres pourraient venir apporter leurs compétences.
Quant aux revendications, Fabrice Terrien déplore que le CHSCT n’ait pas été mis en place alors que le service est départemental depuis 2014, « nous n’en sommes pas fiers. Il sera mis en place cette année, avec 3 réunions par an. » Il explique que des investissements sont effectués malgré tout dans les rénovations des bâtiments. Sur les autres revendications, il explique qu’ « une séquence de dialogue sociale s’est tenue en janvier, et la prochaine se tiendra le 13 mars, durant laquelle nous devrons les hiérarchiser. » En recherchant l’équilibre entre le fonctionnement du SDIS et la capacité financière du Département. Sur le sujet des bouches à incendie, une rencontre doit être programmée avec les communes.
Nous conclurons sur le propos d’Abdoul Karim Ahmed Allaoui en forme de défi, « le directeur dit que son intention est de construire, nous aussi ! » Une première base de dialogue, alors que les agents devaient se prononcer sur la poursuite à donner au mouvement.
A l’issue de le réunion, ils ont décidé de lancer un mouvement “d’ici le mois d’avril pour montrer notre mécontentement”, et en attendant, ils observeront avec attention l’issue de la réunion du 13 mars.
Anne Perzo-Lafond
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