Slogan éculé, mais qui pour le coup colle à la réalité : la formation professionnelle, c’est désormais l’affaire de tous. Créé par la loi du 5 mars 2014, le CREFOP a été mis en place à Mayotte en novembre 2018 par Muriel Pénicaud, la ministre du Travail. Il était très attendu sur un territoire où la formation professionnelle était réduite à portion congrue, « c’était peanuts en financement », dira un des participants. Et alors que le taux de chômage est de 35% en 2018, au sens du BIT, un chômage qui touche en réalité quasiment la moitié de la population en âge de travailler.
Plusieurs acteurs ont désormais la responsabilité de la programmation de la formation professionnelle qui échouait jusqu’à présent au conseil départemental de Mayotte, sur sa compétence Région. Ce dernier copréside avec le préfet le Comité régional de l’Emploi, de l’Orientation et de la Formation professionnelle (CREFOP), qui est quadripartite : les représentants de l’Etat, ceux du conseil départemental, les membres des organisations syndicales et patronales, et les représentants des principaux opérateurs de l’emploi et de la formation professionnelle.
Personne n’est oublié donc dans cette mission de coordination des politiques d’orientation, de formation professionnelle et d’emploi, qui aura aussi le rôle de contrôle de l’efficacité de la politique menée.
Etant donné le faible niveau de compétence à Mayotte, les acteurs présents à la Séance plénière ce vendredi 5 avril, ont débattu sur la nécessité de mettre l’accent sur l’apprentissage et sur l’accompagnement vers l’emploi des personnes peu ou pas qualifiées, visées par le PUIC, le Pacte Ultramarin d’Investissement dans les compétences de Mayotte.
Miser avec constance sur le tourisme
« J’ai demandé que le nombre de places d’apprentis soit doublé d’ici le 31 décembre 2020, nous rapporte le préfet Dominique Sorain, et nous partons de très bas, 250 pour monter au moins à 500 places. » Problème, il n’y a pour l’instant que le Centre de Formation des Apprentis académique (de l’Education nationale), « en attendant que soit finalisé celui de la Chambre des Métiers », et le déficit de maîtres de stage ne permet pas d’encadrer efficacement les jeunes apprentis. Pour y pallier, les regards se sont tournés vers le RSMA, « qui possède des relais compétents. Et nous devons demander des dérogations pour élargir cet accompagnement aux aides moniteurs de la formation professionnelle », complète le préfet.
En ce qui concerne les personnes « fragiles », sans qualification, le PUIC permet de leur garantir des parcours qualifiants en consolidant leurs compétences. Pour sécuriser le parcours de formation, il peut aussi proposer des mesures d’accompagnement dans leurs accès aux droits sociaux, dans l’aide aux déplacements, à l’hébergement ou la restauration.
Les participants ont aussi défini les secteurs en besoin de main d’œuvre, et le tourisme figure en bonne place, malgré son inscription dans la catégorie « Secteurs émergents ». Le tourisme, un secteur qui n’en finit plus de devoir émerger à Mayotte… Une professionnalisation des prestataires ne pourra qu’être bénéfique, en attendant son explosion, un jour. El-Anziz Hamidou, secrétaire départemental de FO, lie le développement de ce secteur aux investissement structurants à attendre de l’Etat : « Je connais des entreprises touristiques qui n’attendent, pour venir à Mayotte, qu’un rallongement de la piste pour leur garantir la desserte aérienne. »
Contrôle des politiques menées
A nouveaux enjeux, nouveaux moyens : « L’Etat s’engage désormais aux côtés du conseil départemental à hauteur de 21,3 millions d’euros sur 4 ans. Ajoutés aux prés de 47 millions d’euros du conseil départemental, ce sont 68 millions d’euros qui seront investis dans la formation sur la période 2019-2022 », explique le préfet. Une convention qui implique un contrôle de l’effectivité de l’allocation des sommes. Un tableau détaille la répartition des sommes par année.
Cinq commissions permanentes ont été entérinées ce vendredi. La première sera chargée du suivi de la situation de l’emploi et des besoins en termes de formation et de qualification. Une autre sera chargée du suivi et de l’évaluation des politiques publiques de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles. Une commission sera dédiée à l’Apprentissage et à l’alternance. Une 4ème gèrera la représentation sur le territoire des opérateurs de compétences nationaux et le financement de la formation professionnelle à Mayotte, et enfin, mais non des moindres, une commission sera chargée du diagnostic, et de l’évolution des outils et des organismes de formation à Mayotte.
Les responsables des commissions n’ont pas encore été désignés. La coordination de leurs travaux sera assurée par le bureau du CREFOP.
Si beaucoup de jeunes sont en errance à Mayotte, le sous-investissement en formation professionnelle n’y était pas pour rien. On change désormais de braquet semble-t-il, « on passe de la formation de masse à l’individualisé », constatait El Anziz Hamidou.
Anne Perzo-Lafond
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