Alors que beaucoup de parlementaires tentent de glisser leur question au gouvernement, lors des séances de l’Assemblée nationale, ce mercredi le sénateur Thani Mohamed Soilihi parvenait à interpeler le ministre de l’Intérieur sur l’arrivée du boutre de Sri Lankais sur nos côtes à Bouéni, à peine démantelé le réseau international de Congolais de RDC par le Groupe d’Enquête sur la Lutte contre l’Immigration Clandestine (GELIC). L’arrivée de ressortissants de cette petite île du sud de l’Inde, faisait craindre au sénateur une possible nouvelle filière, et surtout, que face à un problème non résolu d’immigration massive, les Mahorais ancrent leurs votes au Rassemblement National comme ils viennent de le faire, « un parti extrémiste et populiste qui les oublie dès que l’échéance électorale est passée. »
Deux jours avant, la ministre des Outre-mer avouait la difficulté pour le gouvernement à venir à bout de l’immigration clandestine à Mayotte, « nous n’arrivons pas malgré des moyens supplémentaires à arrêter l’immigration illégale sur le territoire », tout en expliquant « reconduire beaucoup ».
On le sait, tout n’a pas encore été mis en œuvre pour améliorer la lutte contre l’immigration clandestine en provenance des Comores, notamment. La réponse du ministre Christophe Castaner était donc attendue, d’autant qu’il a encore fraîchement (ou chaudement !) en mémoire son séjour à Mayotte, il y a un mois et demi.
Des intercepteurs à Longoni… en attendant Mtsamboro ?
A propos du boutre de Sri-Lankais, le ministre expliquait que le passeur était placé en garde à vue, et que les passagers s’étaient vu « notifier un refus d’entrée immédiatement », et placés en zone d’attente en attendant que l’OFPRA examine leurs dossiers « le plus rapidement possible ».
Quant à la lute contre les filières qui « font commerce de la misère humaine », notamment en provenance d’Afrique, si le ministre a réitéré sa volonté que la pression de l’immigration irrégulière baisse, il n’a fait que rappeler la montée en puissance des moyens humains et matériels de la PAF et de la gendarmerie. Et le positionnement d’intercepteurs au port de Longoni, pour agir plus vite sur les points d’entrée dans le lagon. On pense notamment à l’ilot Mtsamboro, en s’étonnant une nouvelle fois qu’une base permanente n’ait toujours pas été créée à cet endroit stratégique d’arrivée des kwassas. Quels intérêt d’aller ailleurs ?
Plus surprenant, le ministre n’est pas revenu sur son annonce de moyens civilo-militaires, “une stratégie proposée par le président de la République”, que nous avions captée dans une petite vidéo, à bord de l’intercepteur où l’interviewaient les journalistes. Un duplicata de l’opération Harpie en Guyane, avait-on compris. Il faut aussi que le ministre s’exprime sur la mise en place de drones, qui était redevenue d’actualité.
Si Christophe Castaner se réjouit néanmoins du début d’efficacité des moyens mis en œuvre, « sur les trois premiers mois, on note une augmentation de plus de 30% des éloignements », il faut « aller plus vite et plus loin », annonçait sa collègue des l’outre-mer. Les urnes n’ont pas dit autre chose.
Anne Perzo-Lafond