Vendredi dernier, Karim*, 28 ans, comparaissait à la barre pour violences avec usage d’une arme, en l’espèce une paire de ciseaux et un hameçon de pêche. La présidente du tribunal Betty Baroukh et ses deux assesseurs, Floriane Chambert et Frédérica Sarli, ont longuement cherché à déterminer comment les faits se sont réellement déroulés.
Le 25 décembre dernier au matin, Karim sortait d’une nuit très alcoolisée à Koungou sous le prétexte d’avoir voulu « fêter Noël ». Il s’est alors rendu dans un bar clandestin du quartier, nommé « La caverne », en réalité le logement des 3 victimes d’origine africaine. N’ayant pas d’argent sur lui, Karim a exigé de se faire servir une bière gratuitement. Bolar, l’un des tenanciers de l’établissement, lui a alors demandé de partir, ce que Karim a refusé de faire. Le ton est monté, les insultes ont fusé, et Karim a sorti ses armes, des ciseaux et un hameçon de pêche. Deux autres personnes sont alors intervenues et le prévenu a joué du ciseau, blessant l’un d’eux au passage. Les trois victimes ont fini par le maîtriser en le plaquant au sol non sans mal.
« Pourquoi refusiez-vous de partir, monsieur ? », lui a alors demandé la présidente du jury. « Vous n’étiez pas chez vous », a-t-elle ajouté. « Moi on ne me dégage pas de force » a répondu Karim qui arborait une attitude pour le moins arrogante lors de son procès. Pour sa défense, il a indiqué avoir vu l’une des victimes ramasser quelque-chose sous la table. Craignant qu’il ne s’agisse d’une arme, c’est la raison pour laquelle il a sorti ses ciseaux et son hameçon. « Pourquoi vous baladiez-vous avec des objets pareils dans vos poches ? », a encore demandé Betty Baroukh. « Je ne sais pas, je les avais ramassées comme ça », a répondu Karim. Une défense bien maigre pour ce prévenu qui a accumulé les indélicatesses au cours de son procès : il a répondu sèchement à ses juges et a même insulté les victimes au cours de son audition…
Un casier judiciaire bien rempli
Après avoir détaillé l’affaire, la présidente du jury a analysé la personnalité du prévenu et a découvert que son casier judiciaire était déjà bien rempli. Que ce soit à Mamoudzou, ville dont il est originaire, ou à Montauban où il a séjourné plusieurs années, Karim a accumulé les délits : conduite en état d’ivresse ou sans assurance, port d’arme prohibée, vol avec violence, agressions, etc. Un palmarès très riche n’incitant guère la procureure Morgane Pajak-Boulet à la clémence d’autant plus que Karim n’est sorti de la prison de Majicavo que depuis deux mois…
Les juges ont ensuite souhaité entendre les 2 victimes présentes au tribunal, mais cela s’est révélé impossible car elles ne parlaient pas français. Arrivées très récemment du Buroundi, elles ne parlaient que la langue de leur pays. Le tribunal n’ayant pas trouvé d’interprète dans cette langue, le jugement a finalement été renvoyé au 17 janvier prochain. Morgane Pajak-Boulet souhaitait placer Karim en détention provisoire dans l’intervalle, mais la présidente du jury, entendant le plaidoyer de Me Mélanie Trouvé, a préféré le placer sous contrôle judiciaire. L’avocate a en effet défendu son client en affirmant que si son comportement avait été désagréable au cours de l’audience c’est qu’il « s’était senti acculé ». Pour elle, il souhaite sincèrement se réinsérer dans la société et mérite « qu’on lui laisse sa chance ».
Le contrôle judiciaire dont Karim a fait l’objet implique un suivi par les travailleurs sociaux de la SCJE (Service de Contrôle Judiciaire et d’Enquête), une interdiction de paraître sur les lieux du délit et d’entrer en contact de quelque manière que ce soit avec les 3 victimes. Karim est également interdit de débit de boissons et devra être suivi par un psychiatre ou, à défaut, un généraliste.
L.D.
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