La grève des avocats, qui perdure au niveau national comme à Mayotte, est source de nombreux renvois. Presque aucun procès impliquant un avocat ne se tient au tribunal de Mamoudzou. Sans surprise, “l’affaire Zaïdani” n’a pas fait exception. Le renvoi était même tellement attendu que ni l’ancien président du Conseil général, ni son co-prévenu, l’ancien directeur de la Société publique locale 976, ne se sont présentés, préférant laisser à leurs avocats le soin de demander le renvoi.
Un choix risqué rappelle la présidente Clara Faure qui rappelle en substance que même en temps de grève, rien n’oblige les juges à accepter, et que l’audience aurait pu se tenir quand même. Mais les avocats le savent : les magistrats sont attachés aux droits de la défense, piliers de l’indépendance de la justice d’une part, et garants de la tenue d’un procès équitable d’autre part.
Si les avocats n’assurent pas la défense d’un client, son procès ne serait plus tout à fait équitable.
“L’ensemble des barreaux sont en grève, la rencontre entre nos représentants et le premier ministre n’a rien donné, le gouvernement reste sur sa position. Tous les barreaux sont invités à prolonger le mouvement de grève” explique Me Souhahili.
Pourquoi cette grève ?
On le rappelle, la grève des avocats repose sur plusieurs revendications. La plus actuelle, c’est celle de la contestation de la réforme des retraites. Les avocats disposent d’une caisse autonome, autofinancée, et la mise en place d’un système commun risque de voir leurs cotisations dilapidées. “Nous renâclons à ce qu’on nous prenne les 2 milliards qui se trouvent sur notre caisse de retraite” explique à la barre Me Charles Simon.
D’autre part, les avocats dénoncent la réforme de la carte judiciaire qui risque selon eux d’éloigner les citoyens les plus précaires de l’accès au droit.
Me Andjilani interpelle ainsi le tribunal : “Vous avez renvoyé une affaire car la dame avait besoin d’un avocat, c’est exactement le genre de justiciable qui sera pénalisé si la réforme passe telle qu’elle est présentée par le gouvernement. J’espère que vous accepterez le renvoi pour toutes ces raisons là”.
Pari gagné pour les robes noires, les affaires ont toutes été renvoyées à des dates allant de mars à juillet pour le plus gros dossier, celui de la SPL-976. La société avait été épinglée en 2017 par la chambre régionale des comptes qui mettait en cause sa gestion par Saïd Issouf, poursuivi aux côtés de Daniel Zaïdani pour atteinte au droit sur les marchés publics et “abus des biens ou du crédit d’une société à des fins personnelles” pour l’ancien directeur, soupçonné d’avoir indûment perçu deux fois 8000€ de salaires à la fin de son contrat.
Les deux mis-en-cause restent donc présumés innocents et pourront s’expliquer sur le fond du dossier dans cinq mois.
Y.D.
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