“Beaucoup d’enjeux se jouent désormais à l’échelle communautaire” prévenait ce lundi le président du Conseil départemental Ibrahim Soibahadine Ramadani, tout en félicitant les nouveaux élus municipaux et communautaire. En effet, les EPCI, établissements publics de coopération intercommunale, restent méconnus, mais ils gagnent en compétences et ne doivent pas être négligés dans le développement du territoire.
Nous avons joint les directeurs de service de plusieurs intercommunalités et quelques grands axes communs se dégagent, qui vont vite requérir l’attention des élus.
D’abord, l’aménagement du territoire. Que ce soit pour le logement, l’économie ou les services publics, de nombreux projets ont été initiés par la mandature précédente et demandent à être finalisés ou concrétisés. Parmi les plus avancés, on peut citer la ZAC de M’Ramadoudou, portée par la communauté de communes du Sud (CCSUD), qui doit accueillir des équipements aussi variés qu’une caserne de pompiers, des logements, un centre commercial et des services publics. Plusieurs projets similaires sont dans les cartons du nord au sud de l’île. Le premier gros enjeu sera de décentraliser les services concentrés à Mamoudzou, puis de créer de l’activité et donc de l’emploi dans le reste de l’île. A Combani, MRamadoudou, Bouéni, Kani-Kéli etc. , les intercos ont libéré du foncier qui n’attend qu’à être utilisé astucieusement.
“Un autre sujet super important c’est la question de l’habitat, il faut trouver des modalités de construction durable, et passer de l’idée au concret et à du quantitatif” indique Nathalie Deloriol, directrice générale des services (DGS) de la Cadéma (Mamoudzou-Dembéni)
Environnement, tourisme, même combat
Ensuite l’environnement. “Il n’y a pas un seul candidat qui n’en ait pas parlé durant sa campagne” poursuit la responsable salue pour qui c’est “un enjeu essentiel du prochain mandat”.
Au sein de la Cadéma, qui confie le ramassage des déchets à la Star et non au Sidevam comme le reste de l’île, se pose l’épineuse question de la valorisation de ces déchets : recyclerie, tri sélectif, déchetterie, feront forcément partie des réflexions des nouveaux élus, et la population est, c’est un euphémisme, en attente de concret sur ces points.
Pour les autres intercos, le traitement des déchets est aussi un sujet central. Les élus vont-ils choisir le statu-quo vis à vis du Sidevam, ou céder à l’appel de la liberté sur la compétence du ramassage des ordures ? Alors qu’une forte augmentation de la contribution des EPCI est redoutée, celles-ci vont devoir faire leurs comptes, et établir une stratégie.
La propreté est une des clés d’un autre enjeu majeur de développement du territoire qu’est le tourisme. Là encore, si la compétence se télescope avec le conseil départemental, les communautés de communes tentent de s’investir, en mettant en avant les richesses qui leur sont propres. La 3CO, communauté de communes du centre-ouest, veut se vendre comme “grenier de Mayotte” : valorisation des producteurs locaux (d’autant que l’agriculture est aussi la clé de l’approvisionnement des cantines intercommunales, qui doivent alimenter les réfectoires scolaires prévus dans le plan pour l’avenir de Mayotte), des sentiers de randonnée, des produits de terroir, sont autant de pistes qui trouveraient leur cohérence dans un circuit touristique coordonné.
Au sein de la CCSUD, la future ZAC de Hagnoundrou à Bouéni envoie du rêve : hangar à bateau, piscine flottante sur la mer, éco-lodges, autonomie énergétique, c’est un projet massif et tout à fait complémentaire avec celui du voisin du centre-ouest, qui pourrait attirer touristes extérieurs et affinitaires. Le tout à deux pas des célèbres plages de ponte de Saziley et leurs sentiers de randonnée. Pour sécuriser ces projets, la CCSUD a investi dans sa propre police de l’environnement, et devrait recevoir dans les prochains moins un bateau destiné à cette police.
“On est toujours dans un contexte de préfiguration d’office de tourisme du sud, les futurs auront à mettre des directives, le tourisme c’est LE projet du mandat” appuie le directeur Chanoor Kassam.
En bus ou en taxi, mais sans bouchon, c’est possible ?
Mais il n’y aura pas de tourisme sans mobilité, et pas de politique environnementale si les projets coincent dans les bouchons. Là encore, de gros investissements sont dans les tiroirs, et il appartiendra aux futurs élus “soit de mettre le pied sur l’accélérateur, soit sur le frein” indique un cadre communautaire.
Le plus gros projet, c’est le Caribus entre Mamoudzou et Dembéni, avec 5 à 6 lignes de bus et une circulation adaptés à cette nouveauté. Plus qu’un SAV des décisions prises jusqu’à présent, les élus communautaires élus ce dimanche devront assurer le pilotage, et trancher les questions qui demeurent en suspens : quelle coordination avec les taxis, comment répondre à la demande de chaque usager, quelle politique tarifaire…
Les élus de la 3CO pourraient se pencher sur l’idée déjà évoquée de contournement de Combani également.
Ces enjeux et projets ne sont pas une liste exhaustive, et les prochains conseils communautaire s’annoncent extrêmement riches en délibérations et en décisions. Ce qui est sur, c’est que, si dans l’élection municipale, le volet communautaire est souvent méconnu, les responsabilités des nouveaux élus iront bien au delà de leur commune. Les six prochaines années devront être celles de la mutualisation des moyens et des idées.
Y.D.
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