C’est un va et vient au compte goutte mais régulier à l’école de Koropa 1, sur les hauteurs de Majicavo Dubaï (Koungou), ce mercredi matin. Chacun à leur tour, les parents ou frères et sœurs des élèves scolarisés dans l’établissement, franchissent le portail avec à la main, le livret des exercices faits à la maison, et en repartent avec un autre, qui va leur permettre de poursuivre le programme. Les enseignants sont présents, chacun dans une classe, pour les recevoir un à un et donner les explications nécessaires.
Un des papa attend son tour dans un cercle de distanciation, « c’est moi qui aide mon fils à faire ses devoirs, et ça marche, il travaille, même si c’est pas tous les jours », témoigne Moustadrane. Devant lui, une maman qui maitrise peu le français, « c’est le grand frère qui fait travailler mon fils », nous fait-elle traduire. Deux jeunes filles sont venues pour leur petit frère, quant à Jileis, jeune adulte, il est venu récupérer le livret pour sa voisine.
Le flou artistique des élèves oubliés sur le chemin du confinement semble évaporé tant l’implication semble régner. « A chaque distribution, ile ne nous reste quasiment plus de dossiers, les parents sont appelés la veille, selon un programme bien établi. Une journée pour les CP-CE1, une autre pour les CE2-CM1, et une pour les CM2 », nous explique Zaharia Ismaïla Boina, la directrice, la seule femme à la tête d’un établissement scolaire dans cette circonscription. Ils sont 90 à 95% en moyenne à ne pas avoir perdu le contact avec l’école, « c’est une amélioration considérable par rapport au premier confinement, parce que pendant l’année scolaire, nous multiplions les contacts avec eux. Ils reste un petit nombre pour lequel même avec plusieurs numéros, ils sont injoignables », nous rapporte le conseiller pédagogique.
« Je me ruine pour mes élèves ! »
Mais pour en arriver à cette organisation, la directrice a dû batailler, et le recteur Gilles Halbout est pris à témoin : « Nous n’avons pas reçu de gel hydroalcoolique de la mairie, et nous n’avons plus de toner dans les imprimantes. Les livrets pour les élèves, nous avons dû les imprimer au collège ! », explique l’équipe pédagogique.
L’agacement va crescendo avec une enseignante qui se lâche dans une attaque qui frisait le discours politique, mais qui restait dans le concret : « Monsieur le recteur, cela fait plusieurs années que je travaille ici, et depuis 5 ans, la mairie ne donne plus rien, pas de livre, pas de crayons, c’est moi qui doit tout acheter, jusqu’au savon ! Je me ruine pour mes élèves, heureusement que j’aime mon boulot. » Elle rapporte que, en visite avec le préfet il y a un an, le maire avait annoncé 120.000 euros pour les classes, « mais nous n’avons rien eu ». En réponse, Gilles Halbout annonçait vouloir faire le point avec elle “dans un an”, « vous verrez, ça aura bougé ».
Une preuve du laisser aller, un jet d’eau s’élève derrière un des bâtiment, une fuite « depuis la veille 18h » nous informe-t-on, et la mairie appelée depuis tôt ce mercredi n’est pas intervenue.
La représentante de la mairie étant sur place, nous avons interrogé Louhenvelle Leroux, vice-présidente de la Commission scolarité. Nouvellement arrivée, elle jette un voile pudique sur les non-actions de l’équipe précédente, et s’engage : « Il est prévu que 800 euros soient alloués à chacune des 250 classes de la commune, au titre du matériel pédagogique, les livres, les stylos, les cahiers, etc. Une décision qui doit être votée en conseil municipal, mais cela doit passer. Une autre subvention doit suivre fin mars, sur le fonctionnement administratif, c’est à dire les bureaux, les chaises, etc. »
Une volonté d’avancer qui se concrétise déjà nous explique-t-elle par la pose de modulaires à l’école Koropa 3, et le projet de médiathèque à Majicavo Lamir, derrière le collège.
Une visite sous les caméras, utile, puisque pendant cet échange, un technicien de la mairie débarquait, scie en main, pour venir réparer la fuite, et que la directrice essayait de négocier la remise en peinture de l’établissement.
Et qui va dans le sens d’une reprise en main de l’hygiène par les mairies avant la réouverture des écoles.
Anne Perzo-Lafond
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