Cinq ans de travail réduits à néant. Dans les décombres encore fumants des bureaux de l’association ABK, des piles de manuels scolaires carbonisés côtoient les restes d’écrans plats et de canettes métalliques, vestiges de ce qui était encore dimanche une école et une épicerie solidaire.
Réunis devant les ruines de leurs locaux, les bénévoles n’ont pas de mots pour dire leur détresse, épuisés par une quasi nuit blanche. Soumeth Hamid, chargé de projet dans l’association, se souvient avec amertume des heures passées devant les flammes. “Un collègue s’est réveillé vers deux heures du matin pour aller aux toilettes quand il a vu le feu, on a essayé d’appeler les pompiers qui sont venus mais ça a pris du temps, ils n’ont pu commencer à éteindre le feu qu’à 3 heures et demi, donc on n’a eu aucune chance de sauver des objets. Tout le matériel informatique, bureautique, les articles, tout a brûlé.”
Par bonheur, les cases attenantes à l’association ont pu être sauvées, mais pour le matériel de l’association, qu’il s’agisse de l’école, du siège ou de la boutique, “il ne reste rien” déplore Soumeth Hamid. “Nous avions reçu 1800 savons de l’ARS, nous avons pu en distribuer 5 cartons mais tout le reste a brûlé”.
Pour ce bénévole, la cause n’est pas accidentelle. Même en l’absence “de preuve tangible”, “on ne pense pas que ce soit un accident, nous soupçonnons une action volontaire”. Le mobile possible ? “Depuis la création de l’association, nous empêchons des actes de violence, est ce qu’on a voulu nous mettre en difficulté ? On est en recherche d’informations”.
Du côté du commissariat, aucune piste n’est écartée, mais l’enquête débute tout juste. Une enquête d’autant plus douloureuse que le bureau partenariat et prévention de la police de Mamoudzou entretient des liens étroits avec cette association créée en 2016 et initiatrice des Gilets Jaunes, qui avaient un temps réussi à pacifier la zone avant d’être dissous.
“Une catastrophe”
En attendant les résultats de l’enquête, pour ABK, la situation est une “catastrophe, il ne reste rien comment on va travailler ?” s’interroge Soumeth Hamid, pas certain de pouvoir mener à bien les actions prévues en 2021. L’association en appelle désormais aux dons pour rebondir*.
“Cette association a montré au quotidien qu’elle est engagée pour la collectivité et s’est montrée présente dans sa mission de médiation, notamment aux abords des établissements scolaires, ce n’est pas une structure très grosse mais on constate qu’elle est très mobilisée à nos côtés” appuie le commissaire Halm.
Alors qu’à Bandrajou, les habitants craignent d’éventuelles violences suite à cet incendie, le commissaire en l’absence de “pistes particulières” à ce stade rappelle que c’est “le travail de la police de retrouver les éventuels auteurs, il ne faut pas que la population se substitue à la police. On comprend l’émoi suscité mais ce sont des dynamiques dont on connaît le début, jamais l’issue, ce sont vite des spirales de vengeance. Le message qu’on veut faire passer c’est qu’on prend l’affaire au sérieux, on est mobilisés pour retrouver les auteurs s’il était confirmé que c’est d’origine criminelle”.
Y.D.
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