L’effondrement des partis traditionnels révélé par les sondages de cette présidentielle 2022, place les LR en 5ème position derrière Eric Zemmour, Valérie Pécresse totalisant 4,8% des voix. Ses comptes de campagne ne seront pas remboursés, cela sonne probablement le glas du parti. Elle a pu compter à Mayotte sur davantage de soutien, avec 8% des voix. Sans véritablement donner de consignes de vote, elle a indiqué ce dimanche soir « voter en conscience » pour Emmanuel Macron. Le député LR Mansour Kamardine nous livre son analyse du scrutin où Jean-Luc Mélenchon apparaît comme la seconde force politique en local, et des reports de voix pour le second tour.
JDM : Jamais les LR n’ont atteint un score aussi bas lors d’un scrutin. Comment l’analysez vous ?
Mansour Kamardine : Plus qu’une déception, c’est un désastre pour notre formation politique. Nous n’avons pas réussi à imprimer collectivement notre projet dans l’opinion nationale. Personnellement, depuis que je mène des campagnes, celle-ci fut la plus difficile, en raison de plusieurs facteurs, dont la crise sanitaire et la guerre en Ukraine qui est venue perturber les prises de parole. Je le dis et le redis, Emmanuel Macron a une baraka insolente ! Car en période de guerre, on a tendance à s’appuyer sur le pouvoir en place. Valérie a raté le marchepied avec le meeting du Zénith, un peu comme nous à Sada pour les municipales.
Valérie Pécresse a donné une orientation en indiquant voter pour Emmanuel Macron. A Mayotte, Daniel Zaïdani appelle les électeurs de tout bord à suivre le choix des mahorais, c’est à dire à voter pour Marine Le Pen. Quelle est votre position ?
Mansour Kamardine : Daniel Zaïdani peut demander ce qu’il veut, je voterai Emmanuel Macron, même si en matière de lutte contre l’immigration et contre l’insécurité, le compte n’y est pas. Et je demande à tous ceux qui peuvent me faire confiance d’aller dans le même sens.
« On ne construit pas sur la colère »
Les solutions entendues ça et là à Mayotte pour lutter contre l’immigration clandestine et l’insécurité, sont proches de celles émises par Marine Le Pen. Comment allez-vous fédérer ?
Mansour Kamardine : Il faut accepter que la colère des mahorais se soit exprimée au 1er tour. Mais on ne construit pas sur la colère. Il ne faut pas que ce soit un vote sans lendemain pour Mayotte. Or, s’il va en direction de Marine Le Pen, le suffrage n’apportera pas la structuration dont le territoire a besoin. Les thématiques de l’immigration clandestine et de la lutte contre l’insécurité ne sont pas les seules, il faut construire ce territoire maintenant. Comme ce n’est pas avec Valérie Pécresse, ce sera avec Emmanuel Macron.
Contrairement à 2017 où Emmanuel Macron avait composé avec les LR, choisissant un premier ministre de ce parti, cette fois, c’est avec l’Union populaire de Jean-Luc Mélenchon qu’il peut faire alliance s’il est élu. Une orientation à gauche toute du gouvernement ?
Mansour Kamardine : Les résultats ont montré une vraie inquiétude des français. Emmanuel Macron composera-t-il pour autant avec les extrêmes ? C’est difficile à dire. Mélenchon en tout cas n’a pas appelé à voter pour le président sortant, mais a demandé qu’aucune voix n’aille à Marine Le Pen. Emmanuel Macron a parlé de « quelque chose de singulier ». On peut imaginer un gouvernement d’union nationale. Mais en cas d’orientation à gauche, je pense que ce ne serait pas forcément préjudiciable pour Mayotte. Et même si Jean-Luc Mélenchon était choisi comme premier ministre, c’est un ami, il connaît Mayotte, c’est un meilleur avocat de notre territoire que Marine Le Pen, notamment à l’Assemblée nationale où il est intervenu plusieurs fois en notre faveur.
Quels sont les points de divergences entre les deux candidats du 2ème tour sur le sujet Mayotte ?
Mansour Kamardine : A l’heure où la campagne du 2ème tour est engagée, il faut viser l’intérêt de Mayotte et espérer qu’il soit pris en compte. Que je sache, Marine Le Pen n’a rien écrit sur Mayotte, alors qu’Emmanuel Macron, copiant la démarche des LR, a écrit ses engagements dans une lettre aux mahorais. Même s’ils sont en deçà de ce qu’on peut prétendre, on peut les voir comme une feuille de route qui permettra aux parlementaires d’interroger le gouvernement.
Le refus de la loi de développement pour Mayotte ne reste-t-elle pas un point d’achoppement entre Emmanuel Macron et notre territoire ? C’était annonciateur des votes ?
Mansour Kamardine : La colère des mahorais s’est exprimée sur trois points lors de ce 1er tour : l’immigration clandestine, l’insécurité, et la loi Programme. On peut penser qu’Emmanuel Macron l’a compris. La grosse erreur sur Mayotte tient dans le choix des ministres des outre-mer, l’actuel avait d’autres ambitions. Les élus de Mayotte ont été unanimes pour dire que le compte n’y était pas, il faut maintenant bâtir un projet de loi pour Mayotte qui réponde aux attentes des mahorais. Le contexte économique et budgétaire national ne facilite pas les choses, mais il faut extraire nos gouvernants de Paris pour qu’ils se rendent compte sur place et qu’il n’y ait plus d’écarts avec notre réalité.
Propos recueillis par Anne Perzo-Lafond
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