Les activités pétrolières aux Comores ont été quasiment mises en veilleuse depuis quelques temps. Certaines licences d’exploitation accordées à des sociétés sont “d’ailleurs arrivées à échéance en 2022”, selon une source proche du dossier. Les travaux d’exploration ont permis certes de faire des “découvertes de gisements de gaz et de pétrole”, d’après la société Discover Exploration qui travaille depuis plusieurs années aux Comores. Mais les autorités risquent de les repousser encore davantage à cause du manque de ressources humaines qualifiées dans le secteur pétrolier aux Comores.
Maîtriser la chaîne d’exploitation du gaz et du pétrole
Le président Azali Assoumani ne souhaite pas accélérer l’exploitation des hydrocarbures avant la mobilisation des compétences nationales en la matière. Il l’a dit au cours d’un entretien accordé au journal “L’Opinion” en date du 24 septembre. “Nous sommes toujours en phase de prospection pour découvrir du pétrole et du gaz, dans une région riche en hydrocarbures”, a-t-il d’abord expliqué. Pour lui, les Comores devraient s’assurer qu’elles disposent suffisamment d’un vivier de cadres capables de conduire, coordonner et maîtriser la chaîne d’exploitation du gaz et du pétrole.
“Il ne faut pas aller trop vite car nous n’avons pas encore les ressources humaines avec un sens élevé du patriotisme”, a souligné le président comorien avant d’ajouter : “mon ambition est de renforcer la formation de cadres comoriens dans le secteur des hydrocarbures et de définir un cadre de bonne exploitation à l’exemple de la Norvège”.
Azali Assoumani dit également vouloir accélérer le plan de promotion des énergies renouvelables validé en 2017 à l’issue des Assises nationales sur l’énergie. “Notre ambition est d’être indépendants alors que l’on dépend pour l’instant de l’énergie thermique. Nous allons promouvoir les renouvelables comme le photovoltaïque et la géothermie. Le Japonais Toshiba y travaille avec nous”, a-t-il souligné.
Au sujet des compétences nationales dans le secteur pétrolier, le pays est loin du compte. Les Comores ne disposent aujourd’hui que de “8 géologues et de 4 géophysiciens spécialisés dans le secteur et qui ont encore besoin de renforcement des capacités”, d’après une source du Bureau Géologique des Comores (BCG).
Selon le directeur général du BCG, Mohamed Chaheire Mohamed Chamassi, le pays a besoin de compétences à la fois pointues et élevées notamment “dans la géophysique pétrolière pour un traitement et une interprétation sismique, la géologie pétrolière pour l’analyse stratigraphique et structurale et l’évaluation de bassin”. Le responsable parle aussi d’un besoin d’ingénieurs et de spécialistes en forage capable d’assurer la conception, mener des opérations, évaluer les tests et assurer la complétion.
Le chef du Bureau géologique des Comores dit travailler pour mobiliser également des agents en “ingénierie de réservoir chargés de la modélisation et la caractérisation, les essais de puits et l’écoulement, etc.”. Il parle de la formation de cadres en négociations pétrolières mais aussi de fiscalistes, de juristes, d’analystes de risques et d’agents de prospection d’investissement dans le secteur des hydrocarbures.
Le Bureau géologique des Comores envisage “dans une seconde étape”, des formations ciblées sur “les spécialités de la production notamment dans les domaines de l’ingénierie de production (puits, évaluation, modélisation de la production et optimisation), l’ingénierie de structure et métallurgie, l’ingénierie de pipeline et réseau de collecte et le pompage, bilan matière et comptage”, entre autres.
Les travaux de forage devraient en principe démarrer en 2022
Les Comores disposent d’une législation dans le secteur. La loi pétrolière a été adoptée en 2012 après les premiers travaux d’exploration du pétrole aux Comores menés un an plutôt, au mois de mai 2011, par le géant américain GXT Technologies. Le cadre juridique “offre des avantages fiscaux attractifs”, selon l’avis de l’ensemble des compagnies Discover Exploration & Bahari Resources, Western Energy & Safari Petroleum organisées respectivement en deux consortiums distincts.
De nombreux blocs ont été attribués à ces consortiums qui devraient en contrepartie verser des sommes importantes à l’autorité dont une partie destinée à la formation de cadres du secteur. Mais on ignore encore les résultats de leurs travaux. Ni l’inventaire des cadres formés à ce jour et la nature réelle des activités financées aux Comores depuis leur installation. Les rapports officiels sont rarement communiqués.
À ce jour, aucune activité de forage n’a été engagée. L’ancien patron du BCG avait fait savoir au journal Al-watwan que les travaux devant aider à déterminer le volume des hydrocarbures dans certains blocs étaient censés démarrer à partir de cette année 2022. “C’est de 2022 à 2025 que la compagnie commencera les forages exploratoires pour la confirmation de l’existence et le volume des hydrocarbures, avant les installations en mer”, avait-t-il indiqué, citant principalement la compagnie Western Energy qui s’est associée à Safari Petroleum dans le cadre du contrat de production et de partage (CPP) portant sur les blocs 38, 39 et 40.
Autre souci évoqué à demi-mot par le président Azali Assoumani : la sécurité des futures infrastructures et la stabilité intérieure. À l’entendre, l’exploitation et la commercialisation des hydrocarbures peuvent être sources de conflit et qu’il faut parer à toutes les éventualités dans une région de Mozambique exposée à tous les trafics et les velléités d’instabilité. “Il ne faut pas que ceux qui se tiraillent politiquement pour le pouvoir viennent aussi à se quereller pour le pétrole”, a-t-il fait savoir, multipliant les rencontres avec le Mozambique pour réfléchir à une alliance commune contre les potentiels actes de déstabilisation dans cette zone stratégique et sensible de l’Océan indien.
A.S.Kemba, Moroni
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