Avec un plongeon de 18%, les créations d’entreprises sont en chute libre en 2018 à Mayotte. Une baisse d’autant plus notable que sur le plan national, les Français sont de plus en plus nombreux à créer leur boîte (+17%).
Alors comment expliquer ce fossé qui s’est creusé entre le 101e département et tous les autres ?
Sur l’année, Mayotte a vu se créer 758 nouvelles entreprises. C’est 18% de moins qu’en 2017 mais surtout, on constate que sur les mois de mars et avril, les créations sont trois fois inférieures à 2017. On peut supposer que les barrages, et la perte de chiffre d’affaire de nombreuses entreprises mahoraises à cette période-là ont joué un rôle dissuasif pour les entrepreneurs en puissance.
Il faut dire aussi qu’en métropole pendant ce temps, l’assouplissement des conditions de création a généré un pic d’apparitions de micro-entreprises, des structures qui juridiquement n’existent pas à Mayotte. Au niveau national, les micro-entreprises représentent 45% des créations. Rien d’étonnant donc à ce que notre territoire ne bénéficie pas de cette émulation.
Au delà des causes d’une baisse prévisible, c’est dans le détail que se cachent les informations les plus intéressantes.
On constate notamment que le secteur le plus touché par la baisse de créations d’entreprises est celui du commerce, qui est également le secteur le plus dynamique de l’île. Ainsi les créations de commerces ont-elles chuté de 32% en un an. A l’inverse, l’industrie, largement minoritaire dans le paysage entrepreneurial français, a bondi de 50%.
Le profil des créateurs d’entreprises quant à lui change peu. Une majorité sont des femmes (52%) et la moitié a plus de 40 ans. Il apparaît aussi que les femmes sont largement majoritaires dans les créations d’entreprises commerciales, alors que les hommes sont bien plus nombreux à créer des entreprises dans la construction ou l’industrie. Ces données interrogent notamment sur l’opportunité de mettre en œuvre des incitations pour les jeunes, clairement minoritaires dans l’entrepreneuriat.
Toutefois ces chiffres sont à prendre avec mesure. En effet, “on n’a pas de statistiques fiables sur les cessations d’activité car il est fréquent qu’elles ne soient pas déclarées” note Jamel Mekkaoui, responsable de l’Insee Mayotte. Il est ainsi “certain que le fichier d’entreprises est surestimé”.
Impossible également au niveau de l’Insee de savoir si les créations d’entreprises dont on parle sont des créations d’activité, ou des entreprises informelles qui ont été officialisées au cours de l’année.
Il n’en reste pas moins que les créations d’entreprises, tous paramètres confondus, sont au plus bas depuis 2012 à Mayotte. “Est-ce parce qu’il y a eu moins d’activité, ou parce que les administrations qui les enregistrent ont été moins performantes?” s’interroge le statisticien au sujet de la période des grèves, avec laquelle il se refuse à tirer “un lien de causalité directe”. Une question qui se pose alors que “globalement les indicateurs économiques étaient au vert, il n’y a pas un territoire de France qui a eu une progression du PIB comme Mayotte, cela devrait se traduire par des créations d’entreprises et d’emplois”.
Tiens d’ailleurs justement, et l’emploi, dans tout ça ?
Pour ça il faudra être patient, répond l’Insee, une enquête sur le sujet sera dévoilée le 19 février.
Y.D.
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