Alors que la valorisation des déchets ménagers fait l’objet d’un suivi annuel, celui des gravats et ferrailles est encore laissé au bon vouloir des entreprises du BTP. Une donnée qui va évoluer… avec le temps.
Les déchets issus des chantiers des entreprises de Bâtiments et Travaux Publics (BTP) sont longtemps partis dans la nature, faute d’une législation trop consensuelle, « pas assez prescriptive » regrette Fabrice Molinier, de la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DEAL) qui s’exprimait vendredi dernier dans le cadre des matinales de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Semaine du Développement durable.
Un constat que partage celui qui en est responsable à la Préfecture, Bertrand Brohon, chargé de mission à la Coopération territoriale : «le Plan de gestion du BTP, il est vrai trop «mou», que nous avions adopté en 2006 n’a pas été soutenu après mon départ, et ne concernait que quelques voiries et des constructions naissantes, le tout sans association comme l’ADEME pour l’accompagner». Des déchets qui partaient donc «vers de pseudo décharges, des remblais épars», indique le représentant de l’entreprise EBE.
Or, les 50.000 tonnes de déchets en 2013 rapportés à la faible superficie de l’île incitent à la rigueur. Car même si les acteurs ont décidé de s’y atteler, le chemin est encore long pour plusieurs raisons.
Pas d’obligation
Un Schéma d’Organisation de la Gestion et de l’Elimination des déchets de Chantier (SOGED) existe, que les entreprises peuvent élaborer, mais sans contrainte, et le critère de l’environnement n’est pas obligatoirement intégré à l’appel d’offre, simplement conseillé.
D’autre part, le traitement des déchets entre dans le cadre de la décentralisation de l’Etat vers le Conseil général qui devient l’acteur principal de la gestion des déchets et doit en ce sens élaborer les trois types de plans : celui de la Prévention de déchets dangereux, celui des déchets non dangereux et enfin des déchets du BTP.
Si Ibrahim Ahmed Combo qui en a la charge, annonçait que l’appel d’offre du Plan des déchets dangereux avait été lancé le 28 mars 2014, il se plaint d’un «sous dimensionnement de la Direction de l’Environnement du Conseil général qui ne permet pas de traiter tous les domaines en même temps». Ainsi, on apprenait que le Plan de gestion des déchets du BTP ne serait révisé qu’en 2015.
Sans véritable cadre, les plus grosses entreprises mènent leur propre réflexion. C’est le cas de EBE, Entreprises Bugna Eric, qui enfouit aujourd’hui 100% de ses déchets inertes, «sans aucun impact pour l’environnement», indique son représentant qui annonce viser leur réutilisation à 80%.
Intéresser au recyclage
Tetrama a valeur d’exemple. Entreprise spécialisée en voirie et terrassement, elle possède quatre sites de stockage de déchets inerte sur l’île. Les prix pour le stockage des déchets varient entre 17€ et 66€/m3 selon qu’il s’agit de terre pouzzolane (volcanique) ou de béton ferraillé. Leur valorisation est diverse : «la terre pouzzolane est réutilisée en remblai sur certains chantiers, les pneus usagés déchiquetés, les déchets verts sont en cours d’étude mais les arbres débroussaillés partent déjà vers la scierie de Coconi, et enfin, nous pratiquons le tri sélectif sur les chantiers», indique Laetitia Rimoux, chargée de mission environnement chez Tetrama.
Mais la jeune femme ne veut bercer personne d’illusions, «la valorisation est une opération coûteuse pour les entreprises et pas forcément plus intéressante que l’envoi vers le centre de stockage des déchets non dangereux (ISDND)». Seule la prise de conscience de préserver l’environnement pour les générations futures fait la différence…
Un constat qui nécessite un accompagnement pour Olivier Novou, élu CCI organisateur de la matinale. «D’autant plus que l’Europe n’accordera des aides que si les 70% de récupération de la directive Grenelle sont effectifs», rappelait Fabrice Molini.
La vertu de cette matinale CCI organisée dans le cadre du développement durable aura été de mettre les acteurs en présence, «une accélération de l’échéancier serait une bonne chose», concluait Olivier Novou.
Anne Perzo-Lafond
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