Certains à Mayotte sont devenus des spécialistes pour acheter des billets d’avion à petits prix dans une totale illégalité. Cette semaine, les polices du monde entier ont lancé une opération pour faire tomber le système.
Léa* adore voyager. Thaïlande, Guyane ou Métropole, elle prend l’avion d’autant plus facilement, qu’elle achète des billets d’avion à prix défiant toute concurrence. «Mon premier voyage, je l’ai fait en 2010, témoigne Léa. J’ai découvert ce système par une simple annonce sur le site ‘le bon coin’. Pour avoir le billet, il fallait envoyer un mail avec mon nom, ma destination, les dates et le nombre de personnes. Le règlement se faisait par Western Union.»
350€ pour l’Asie au départ de la Métropole, 300€ pour un Mayotte-Paris en plein mois de juillet. Elle a également fait une très bonne opération avec un billet pour Cuba et la République dominicaine au départ de Mayotte via Paris pour 1.500 euros aller-retour. Si ces tarifs sont effectivement imbattables, ils sont surtout impossibles à trouver dans les réseaux commerciaux traditionnels. Car ces billets sont issus d’un système parfaitement illégal.
Un trafic basé en Afrique
«Au départ, j’ai posé des questions. Ils m’ont expliqué qu’ils proposaient des billets invendus», explique Léa. Mais au fil du temps, elle comprend que la réalité est bien différente.
La combine est très simple. Dans plusieurs pays africains, des malfrats récupèrent les informations de cartes bancaires volées ou de yes cards (cartes vierges piratées) avec lesquelles ils achètent des billets d’avion sur les sites des compagnies aériennes. Ils les revendent ensuite à prix fortement réduits aux clients qui ont passé commande en répondant à une annonce ou sur une page Facebook.
«Au début, les versements se faisaient à Marrakech, puis à Abidjan et finalement au Cameroun. C’était facile de voir la différence entre la valeur réelle du billet et ce que je le payais, avoue Léa. Le vrai prix est marqué sur le billet.»
Opération mondiale de police dans 61 aéroports
Comme Léa, qui a également fait venir à Mayotte toute sa famille et ses amis de Métropole avec ce système, des dizaines de Mahorais et des milliers de personnes à travers le monde, voyagent en parfaite illégalité mais ça ne va peut-être plus durer.
Depuis longtemps, le système a été repéré par les polices mondiales et elles ont décidé de passer à l’action. Cette semaine, des voyageurs ont été contrôlés dans 61 aéroports du monde entier. Sous l’égide d’Europol, l’opération menée par les autorités de 33 pays (dont les membres de l’Union européenne, le Brésil, la Colombie…) visait à interpeller les titulaires de certains de ces billets d’avion acquis frauduleusement.
Les compagnies aériennes touchées par ces escroqueries sont parvenues à repérer 56 malversations en France métropolitaine. En Métropole, une cinquantaine de gendarmes des Transports aériens (GTA) ont procédé ce mardi à 29 interpellations dans les aéroports de Bordeaux, Roissy, Marseille et Nice.
A priori, aucune opération n’a été menée dans les aéroports de l’Océan indien. Pour autant, certains contrevenants ont déjà été repérés dans notre région, comme cette passagère qui a récemment été contrainte par une compagnie aérienne de régler le prix réel de son voyage pour éviter les poursuites… Un Paris-Réunion en première classe.
Léa, elle, affirme ne plus avoir recours à ces billets depuis plus d’un an. Un choix qui semble judicieux tant il apparaît que voyager dans ces conditions devient à présent beaucoup plus risqué.
RR
*Le prénom a été changé
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