On s’en doutait un peu, mais à l’ambitieux 50% d’énergie renouvelable dans le mix énergétique prévue en 2020 dans les outre-mer, il faut enlever un zéro pointé à Mayotte… puisque nous n’en sommes toujours qu’à 5%.
A cela plusieurs raisons, dont certaines nous dédouanent tout à fait. Tout d’abord, la production d’électricité à Mayotte à travers les deux centrales EDM, est alimentée au gasoil, dont elle est le plus gros consommateur de l’île. Dans ce domaine, les choses pourraient changer. La société Sigma/Somagaz avait évoqué son projet d’usine électrique, en collaboration avec Engie, qu’elle a fait évoluer puisqu’il est pensé pour être approvisionné au biogaz et non plus au GPL. Une évolution qui va dans le sens d’une diminution de l’empreinte carbone.
Electricité de Mayotte (EDM) ensuite, qui est encouragée par la Commission de Régulation de l’énergie (CRE) à convertir les moteurs de la centrale de Longoni au biocarburant, fruit d’une étude menée depuis 2016. « Nous en sommes à un stade de réflexion très poussée, et même orienté vers l’action », commentait Claude Hartmann, directeur d’EDM ce lundi.
“L’étude concerne deux types de biocarburants, les EMAG (Ester méthylique d’acide gras) produits à partir d’huiles végétales (colza, tournesol, palme, etc.) ou le biodiesel issu d’huiles végétales hydro-traitées”, indique la CRE dans son étude publiée en février 2020. Lire le Rapport CRE MAYOTTE 2020
Selon le directeur d’EDM, le projet permettrait de pousser d’un coup le curseur de la proportion des énergies renouvelable à 30%, en comptant le développement du photovoltaïque ». Bonne nouvelle, car, de ce côté, nous avons vécu des années de léthargie.
L’énergie solaire sur un département qui en est abondamment inondé, est insuffisamment développée, et c’est un autre frein que nous avons à de nombreuses reprises relayé. L’arrêt sur le plan national de la défiscalisation sur l’emploi de panneaux photovoltaïque par les particuliers a donné un coup de frein brutal à son développement.
Bientôt notre grosse pile
Un autre écueil était posé par la Commission de Régulation de l’Energie elle-même, qui maintenait une réglementation que nous avions jugée castratrice de blocage des compensations qui permettent le stockage de ces énergies volatiles.
Or, avec une pointe de consommation électrique entre 18 et 19h, impossible chez nous d’utiliser du solaire, il fallait donc pouvoir utiliser le l’énergie stockée. De plus, il n’est pas possible de cumuler en journée plus de 30% d’énergie solaire, sans quoi, le moindre nuage impliquerait de passer brusquement sur le régime général, risquant de provoquer des clashs. La mise en place de batteries géantes était nécessaires mais impossible, car non financée. Plusieurs projets comme Opera* en 2013 avaient été abandonnés.
Les cordons de la bourse sont désormais dénoués, « il y aura bientôt un appel d’offre sur les capacités de stockage », indique le directeur d’EDM.
Il rappelle que les fermes photovoltaïques sont grandes consommatrices de foncier, et c’est un frein supplémentaire à Mayotte. Or, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de Mayotte, adoptée le 19 avril 2017, définit de manière ambitieuse les objectifs et les enjeux de politique énergétique à horizon 2023, en mettant l’accent sur le photovoltaïque.
Il s’agit de rendre obligatoire leur installation sur les bâtiments publics et tertiaires privés, « en particulier sur les nouvelles écoles et autres bâtiments publics, les centres commerciaux et parcs de stationnement couverts, les entrepôts et hangars. En effet, compte tenu de la rareté du foncier disponible à Mayotte, l’installation de photovoltaïque sur les toitures doit être privilégiée ». Le développement de serres photovoltaïques au service du développement d’une filière agricole mahoraise, est aussi préconisé. Lire
Claude Hartmann a l’air confiant sur l’évolution de la proportion d’énergies renouvelables, « le décollage est pour bientôt ! »
Anne Perzo-Lafond
* « L’Opération pilote énergies renouvelables » consistait en une pile géante rechargée à l’énergie solaire et qui permettrait au réseau électrique mahorais de passer le fameux cap de 30% d’alimentation aux énergies renouvelables
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