Le préavis de grève porte les cachets de la CFDT et de la CGT. Selon le document remis à la direction, ce sont ces deux syndicats qui seraient à l’origine de l’appel à la grève.
Ce lundi pourtant, la section CGT de l’ARS s’est désolidarisée du mouvement.
“La CGT de l’ ARS a pris note qu’un préavis de grève a été déposée pour le mercredi 14 octobre. La CGT annonce qu’elle ne prendra pas part à cette grève donc elle ne partage pas la motivation. Elle n’appelle pas à la grève” indiquent les élus dans un communiqué succinct.
Force Ouvrière n’apparaît pas sur le document, mais le syndicat a également souhaité réagir à ce préavis, précisant n’avoir “pas été concerté” et ajoute ne soutenir “ni les revendications ni les méthodes employées pour accompagner ce préavis de grève”.
La CFDT ferait donc cavalier seul sur ce dossier.
Dahalani Kamalidine organisait un point presse sur le parking arrière de l’agence régionale de santé lundi matin. Il y exposait ses revendications qui portent sur plusieurs grands thèmes. D’une part, la gouvernance de l’ARS. S’il ne s’agit pas d’une remise en cause directe du travail de Dominique Voynet, la CFDT réclame une décentralisation des pouvoirs, estimant la gestion trop concentrée autour du secrétariat général notamment. Ensuite, le syndicalistes interpelle sur la question de la formation professionnelle, réclamant des moyens pour la formation, mais aussi l’accès de Mahorais à des postes de cadres, ce dont ils seraient exclus selon lui. Il parle même de “mépris” de la direction, un terme récurrent lors de mouvements sociaux. Enfin troisième grand sujet, le plan régional de santé, censé définir les orientations de l’ARS de Mayotte pour plusieurs années. Celui-ci, élaboré en 2018 pour 5 ans, intégrait la Réunion dont dépendait alors Mayotte. Il ne tient pas compte du projet de nouvel hôpital promis par le président Emmanuel Macron lors de sa visite sur l’île. Les grévistes estiment qu’il est temps de rédiger un plan spécifique à Mayotte pour mieux consommer les fonds, qu’ils estiment sous-utilisés.
“Un certain nombre de ces revendications ne sont pas étayées par des arguments ou des faits”
Autant de points qui laissent la directrice Dominique Voynet songeuse. Cette dernière s’est entretenue dans la matinée avec les agents de l’ARS, avant de revenir vers les journalistes.
“Un certain nombre de ces revendications ne sont pas étayées par des arguments ou des faits” commente-t-elle. Sur l’organigramme et la gouvernance, l’ARS de Mayotte est “calquée sur la plupart des ARS, avec un secrétariat général au sein duquel on assure la sécurité budgétaire et juridique de l’ensemble des services”. “
“On me reproche la concentration des pouvoirs sous la houlette de la secrétaire générale, mais ce n’est pas moi qui ai décidé cette organisation, c’est l’ancien directeur, et ça n’avait jamais posé de problème.”
Sur la question de la formation des agents, une réponse en deux temps est formulée.
“Sur la formation je dis moi même que ce serait bien de renforcer les moyens dédiés, on a même recruté quelqu’un, c’est essentiel” entame Dominique Voynet, avant de balayer les accusations de mépris de la CFDT. En effet, pas moins de 5 chefs de service mahorais ont été formés et nommés depuis qu’elle est là. Deux de plus pourraient les rejoindre prochainement. Il faut précise la direction y ajouter Mouhoutar Salim, le DGA.
Une réalité que les syndicalistes ne peuvent ignorer puisqu’ils comptaient dans leurs rangs sur le parking de l’ARS l’ancienne maire de Sada Anchya Bamana, promue “cheffe du service premiers recours” après les municipales, une affectation décrite comme un poste clé valorisant ses compétences de maire. Pas de mépris donc, au contraire.
“J’ai été frappé par une phrase d’un syndicaliste qui a repris une phrase d’un pompier gréviste en disant que travailler sans les Mahorais c’est travailler contre les Mahorais. On ne peut pas dire que je travaille sans les Mahorais. Si j’ai 2 candidats de compétence équivalente, je ne trouve pas choquant de prendre celui qui restera longtemps et s’investira à Mayotte.”
Néanmoins ceci étant dit, Dominique Voynet alerte sur le risque d’une dérive populiste de ce genre de revendication, surtout si elles ne sont pas fondées.
“Le message dominant « Mayotte aux Mahorais » ça ne tient pas la route, on a besoin les uns des autres. Si on est un département français, tous les Français doivent être à leur aise à Mayotte comme tous les Mahorais doivent être à leur aise en métropole” pose la directrice de l’ARS.
Quant au projet régional de santé, il s’agit selon la directrice d’une “revendication nouvelle”, et guère plus fondée que les précédentes.
“Le projet régional de santé, j’en ai parlé la veille du jour où ils nous ont annoncé leur préavis de grève. On a demandé l’arbitrage du ministère.” Ce dernier doit rendre un avis juridique. Toutefois la rédaction d’un nouveau document à ce stade n’emporte pas la faveur de la directrice.
“La personne qui va me convaincre que l’urgence c’est de reproduire du papier pendant des mois, il est pas né. Un PRS c’est 2000 pages. Il manque bien la mention du 2e hôpital, mais on sait bien qu’on ne posera pas la 1e pierre dans l’année qui vient. Je préfèrerais qu’on s’attaque au Covid, aux chantiers de prévention, à l’alimentation, aux infections… Sur le Covid on n’est pas encore sortis de l’auberge.”
Se pose alors la question de l’intérêt de cette grève, puisque les points soulevés ne relèvent pas de sujets négociables à court terme comme les conditions de travail. La réponse est peut-être à trouver dans les communiqués distincts de la CGT et de FO, le premier syndicat invitant “les agents à soutenir les revendications portée par la CGT” quand FO rappelle clairement la “perspective des élections professionnelles au Comité d’Agence et des Conditions de travail qui se dérouleront en novembre 2020 au sein de l’ARS de Mayotte”.
Y.D.
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