Le maire de Mamoudzou Ambdilwahédou Soumaïla en a fait un cheval de bataille dès son élection : les vendeurs à la sauvette doivent disparaître, à terme, des trottoirs de la commune.
Jadis nombreux sur la place de la République, ils ont dans un premier temps été écartés des alentours du marché couvert où ils présentaient une concurrence déloyale. En sous-main, la mairie exécutait sa volonté de les “éradiquer” de la “vitrine de Mayotte”. De fait, la présence de dizaines de vendeurs -avec souvent des produits dangereux comme des médicaments ou des cosmétiques interdits- près du comité de tourisme, faisait mauvais ménage avec toute velléité de développement touristique.
Ce premier périmètre a désormais vocation à s’élargir. Mais le conseil municipal a compris depuis les premières annonces du maire, que le phénomène ne ferait que se déplacer si les vendeurs sont écartés sans solution pérenne.
C’est l’esprit de la convention qui vient donc d’être signée entre la municipalité et l’ADIE, association pour le droit à l’initiative économique, qui a vocation de faciliter la création d’entreprise.
Lutter contre l’économie informelle
En effet, à Mayotte, et Mamoudzou n’échappe pas à ce constat, “l’économie souffre du manque de structuration de certaines filières, du manque de bancarisation et de l’économie informelle” regrette Munia Dinouraini, adjointe au maire en charge des affaires économiques. “L’ADIE est spécialiste de l’accompagnement à la création d’entreprise, elle a contribué à réduire la part d’informel dans l’économie sur le territoire communal. Nous espérons avec cette convention avoir les effets escomptés” poursuit l’élue.
En clair, la mairie a commencé à mener un recensement des vendeurs à la sauvette et “200 à 300 personnes ont été identifiées comme vendeurs ambulants” note l’adjointe.
Or, poursuit Ségolène Martin, de l’ADIE, “selon l’Insee, sur l’ensemble des entreprises informelles à Mayotte, les ¾ seraient étrangers dont la moitié en situation régulière. Dans le projet Tremplin (programme qui a pour objectif d’accompagner les entrepreneurs dans l’immatriculation de leur entreprise, NDLR), 23 personnes sont suivies dont 11 sont déjà immatriculées. L’idée c’est que sur l’ensemble de l’informel, la moitié serait formalisable.”
Par déduction, et même si aucun chiffre officiel n’est annoncé, ce sont donc en théorie plus d’une centaine de vendeurs informels qui pourraient, par leur situation administrative, voir leur activité régularisée, et trouver une place dans les prochains marchés légaux qui doivent être créés à Cavani, Tsoundzou, Vahibe et Passamaïnty. Sans oublier la rocade de Mtsapéré.
De plus, entre 2020 et 2021, pas moins de 1000 entreprises se sont créées à Mayotte, c’est 20% de plus que l’année précédente. Une vague de régularisations que laquelle la mairie entend bien surfer.
Eviter de déplacer le problème
Pour y parvenir, le recensement des vendeurs doit se poursuivre, et l’information de ces derniers aussi. Beaucoup pensent en effet, explique l’Adie “que l’on ne peut pas créer une entreprise avec un titre de séjour d’un an”. La barrière de la langue, l’absence de numéro de sécurité sociale ou la méconnaissance des dispositifs d’exonération de cotisation sociale pour les micro-entreprises durant leurs deux premières années d’existence, sont autant de freins qui peuvent être levés.
L’autre grand chantier, concède l’adjointe au maire, sera de “convaincre”. A Hamjago, les vendeurs du bord de route, qui ont désormais leur marché couvert, ont perdu en visibilité ce qu’ils ont gagné en respect des normes. Et certains reviennent au bord de la route pour retrouver une clientèle. Tout ce que la mairie de Mamoudzou souhaite éviter.
C’est donc une nouvelle étape dans un chantier de plusieurs années qui a été actée ce mercredi avec l’Adie. Par laquelle la municipalité fait le choix d’avancer coûte que coûte vers un paysage urbain plus formel et plus pratique. C’est du moins l’ambition affichée. Et si la proposition d’une circulation alternée a été retoquée par la justice, la possibilité de profiter des bouchons pour acheter ses bananes sans quitter le volant ne sera sans doute bientôt plus qu’un lointain souvenir.
Y.D.
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