CARNET DE JUSTICE DU JDM. Il ne se souvient de rien mais la ligne de défense est classique. Logiquement, ce mercredi matin, le tribunal s’est d’abord montré sceptique. Mais au fil de l’audience, il est apparu qu’effectivement, Saindou n’a quasiment rien gardé en mémoire de cet après-midi du 13 juin dernier dont il doit répondre.
Il se rappelle tout de même la bouteille de rhum qu’il a commencé à descendre vers 13 heures et qu’il aurait fini deux heures plus tard… de quoi lui assurer un solide taux d’alcoolémie quand il va perdre le contrôle.
Alors qu’il déambule dans les rues de Passamainty, une voiture calle et s’arrête à côté de lui. Il propose son aide au conducteur qui refuse gentiment. On ne saura jamais ce qui lui passe par la tête : il se jette sur l’automobiliste, l’expulse de son véhicule et prend le volant. Mais la voiture a décidément des problèmes mécaniques, il calle à son tour une centaine de mètres plus loin après avoir roulé sur les pieds d’un enfant. Le gamin est blessé (3 jours d’ITT) et les témoins se massent autour de l’accident, Saindou insulte tout le monde.
Quand les policiers arrivent, la sœur de Saindou se tient debout à côté de son frère qu’elle a réussi à calmer, face à la foule qui voulait s’en prendre à lui.
Drôle de fumette
Placé en garde à vue, Saindou semble d’abord s’apaiser, pas pour longtemps. Passés 22 heures, sans explication particulière, il se déshabille entièrement dans la cellule de garde à vue et recommence à insulter toutes les personnes qui passent pas là. Et les choses ne s’arrangent pas quand il est entendu vers 1h30. «Je n’ai rien fait, je n’ai rien à dire», martèle-t-il en boucle. A la question de savoir s’il a bu ou consommé des substances illégales, il répond simplement : «J’ai ramassé du pneu par terre et je l’ai fumé.»
Compte tenu de son attitude, les policiers pensent que Saindou se moque d’eux. Et pourtant, il a bel et bien fumé du pneu !
-C’est fumable du pneu ? demande interloquée la présidente Peyrot. Comment vous le fumez, vous le roulez ?
Saindou se lance alors dans une drôle d’explication où on comprend qu’il roule du pneu avec le papier aluminium des paquets de cigarettes… «Fumer du bangué c’est interdit, mais je voudrais vous dire que pour votre santé, il faut arrêter tout de suite de fumer du pneu !» explique alors la présidente sous les rires de la salle d’audience.
Saindou a déjà été condamné trois fois à Toulouse, pour conduite sans permis en novembre 2011 (400 € d’amende), pour outrage à une personne dépositaire de l’autorité en juin 2013 (3.000€ d’amende) et par un tribunal à compétence militaire pour violation des consignes (2 mois de prison avec sursis). Cette dernière peine entrainera son expulsion de l’armée mais ce mercredi matin, le tribunal ne parvient pas à savoir quelles ont été les raisons précises qui avaient entraînées la procédure : «Je ne m’en souviens pas», dit une nouvelle fois Saindou.
-Ca m’inquiète, lui répond la présidente.
-Moi aussi, concède-t-il.
Saindou est condamné à 6 mois de prison avec sursis et 140 heures de travail d’intérêt général (TIG) à effectuer avant 18 mois. La condamnation est également accompagnée de toute une série d’obligations, «on a tout mis», admettait la présidente : dépendance à l’alcool, aux stupéfiants « même si le pneu n’est pas encore reconnu comme tel» et obligation de suivi psychologique. Saindou devra également verser 600 euros de dommages et intérêts au propriétaire du véhicule «carjacké»… en espérant que Saindou n’oublie pas.
RR
Le Journal de Mayotte
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