La 1ère Fête du Cocotier avait un but ce samedi : détailler les actions en cours pour sauver l’arbre en perdition à Mayotte. Elles sont centrées autour de la naissance d’une nouvelle espèce issue d’un mariage génétique.
« Emblème des Outre-mer », comme le rappelait le sous-préfet Philippe Laycuras, parfois un peu trop poussé lorsqu’on évoque les « diplômes cocotier », celui de Mayotte est en difficulté.
En 2000, les agriculteurs de Mtsangamouji sont inquiets, « ils ont cru que les cocotiers allaient disparaître », se souvient Dader OUbedi, Responsable génétique du cocotier au lycée agricole de Coconi. Une mission du Cirad, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, est dépêchée sur place qui dresse un constat alarmant : les cocotiers de Mayotte sont trop vieux, « 350 000 avaient plus de 50 ans ».
Or, comme le dira Roukia Lahadji, la maire de Chirongui, en présence du député Boinali Said, de la préfecture et de la CAPAM, lors de l’inauguration à Mramadoudou de la Fête du Cocotier, « toute notre vie tournait autour du coco : toits et murs des maison en feuilles tressée avant l’arrivée des maisons SIM, sans parler bien évidemment de l’alimentation ». Si le lait de vache a remplacé le lait de coco comme boisson matinale, « la noix garde sa place sur le plan culinaire ».
Un mariage… « devant le cadi », certifiaient les édiles du jour
Le verdict est tombé : « pour ne pas en être réduit à dire un jour ‘il était une fois le cocotier à Mayotte…’, nous devions régénérer l’espèce », explique le scientifique passionné, Dader Oubedi.
Si la conservation est indispensable, elle est repensée en terme de diversification : « nous avons choisi de marier l’espèce mahoraise du Grand local de Mayotte qui grandit vite au Nain jaune de Malaisie qui produit 4 fois plus, trois fois plus vite et reste naine, donc plus facile à exploiter ».
Une sorte de pendant horticole des « zébuliardes », reproduction des zébus avec les vaches Montbeliardes, qui sera d’ailleurs appelé « Maymalé », remix de « Mayotte » et de « Malaisie ».
Il y a quatre ans, les premiers tests sont faits : hermaphrodite, la fleur du cocotier Nain jaune va se voir amputer de ses épis mâles par la main de l’homme, « nous récupérons la semence mâle chez le Grand local de Mayotte, que nous broyons et séchons en laboratoire, pour ensuite le pulvériser sur les ovaires du Nain jaune, les stigmates, qui restent ouvertes pendant un mois ».
7 000 plantations par an
Trois mois après, de petites noix jaunes de l’espèce hybride sont déjà formées. A 12 mois, les noix de coco sont sèches, tombent au sol sur leur côté bombé, « la nouvelle pousse de cocotier va alors germer et sortir au bout de deux mois ». Le tour génétique est joué, et le petit cocotier, planté, deviendra grand.
Le seul bémol est la durée de vie, « 45 ans au lieu de 70 ans », glisse Dader Oubedi, mais avec une récolte plus précoce et plus rentable.
La programmation de cette opération est l’axe de la communication de l’Ammeflhorc*, « financée à 80% à part égale par l’Etat et le Conseil général », explique son président Chadhouli : « notre objectif est de vulgariser ces actions auprès du grand public pour le sensibiliser, mais aussi de suivre techniquement les agriculteurs vivriers et fruitiers ».
Il déplore être encore loin du but fixé, « 7 000 nouveaux cocotiers par an, alors que pour l’instant, 15 000 ont été plantés de 2010 à 2013 ». Roukia Lahadji s’est empressée de donner le ton en plantant un cocotier dans le jardin de l’école de Mramadoudou.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* Association Mahoraise pour la modernisation de l’Economie Fruitière, légumière et horticole, et de la cocoteraie
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