Le JDM vous racontait le week-end dernier l’affaire des yaourts dans laquelle un jeune homme âgé de 20 ans comparaissait pour avoir volé des Oula et avoir dégradé les murs d’un restaurant en inscrivant «Minuit 02 : l’heure du crime». Ce mercredi, il était de retour à la barre du tribunal correctionnel.
Après les yaourts, le jeune homme devait justifier d’un autre casse particulièrement audacieux au restaurant d’application Agepac Apprentis d’Auteuil à Mamoudzou. Dans la nuit du 2 au 3 décembre, il escalade le grillage qui entoure les locaux de l’association, il force une poignée de porte puis met le feu à cette porte pour mieux pouvoir accéder à l’intérieur. Pour le feu, il rectifie : «c’est des nappes en papiers qui ont brûlé. C’était un accident». Quoi qu’il en soit, il réussit à entrer pour attaquer sa cible : le frigo.
A 3h25 du matin, les policiers dressent un procès-verbal dans lequel ils racontent qu’ils ont trouvé le prévenu entre les mains du gardien qui a fini par intervenir et maîtriser le malfrat. Le jeune homme sent l’alcool, il a consommé un peu de vin rouge. En réalité, la pièce toute entière sent l’alcool car un cubi est tombé au sol et s’est éventré. Le jeune homme n’est pas venu pour se saouler. «Je cherchais à manger», dit-il simplement, comme quelques jours auparavant pour l’histoire des yaourts.
Sauf que cette fois-ci, rien à manger dans le frigo. Juste des canettes d’Oasis. Il va en boire deux. A ce stade de l’histoire, on a envie d’écrire : et voilà ! Bassi !
Accablé
Pourtant, soudainement, dans la salle d’audience, les choses prennent une ampleur inattendue. Tout semble l’accabler comme cette histoire d’alcool qui focalise l’attention : «On peut entendre que vous êtes en situation difficile mais là, vous essayez de voler de l’alcool. Ce n’est pas vital l’alcool», fait remarquer un assesseur.
«Oui, ça lui arrive de boire de l’alcool, s’emporte son avocate Me Hassan. Il a vécu des traumatismes en RDC (il est né à Goma) et il a vu sa mère disparaître dans les eaux quand le kwassa qui emmenait sa famille à Mayotte s’est renversé … Alors, oui, ça lui arrive de boire un peu l’alcool !»
Le jeune homme a obtenu le statut de réfugié politique mais il n’est encore en possession que d’un récépissé, il ne peut donc pas encore se prévaloir des aides qui vont avec ce statut.
La Procureur Prampart va commencer son réquisitoire doucement : «Mon propos est d’être pragmatique et de ne pas charger la barque»… Sauf que 10 minutes plus tard, elle demande 16 mois de prison dont un an ferme avec mandat de dépôt.
Entretemps, elle a rappelé que le jeune homme est en état de récidive légale, déjà condamné, 6 mois ferme plus de la prison avec sursis pour vol aggravé.
3 mois ferme
«Quelle réquisition pour deux canettes d’Oasis», s’exclame Me Hassan jugeant le réquisitoire totalement disproportionné. «C’est un garçon qui fait des efforts et est en instance de réinsertion dans la société.» Pôle emploi ou sécu, il est inscrit et respecte les rendez-vous qu’on lui fixe. Comme il a respecté le contrôle judiciaire auquel il est astreint… à un détail près, ne plus commettre de délit. «Son passé n’excuse pas ce qu’il a fait mais je vous demande de faire preuve de mesure pour lui laisser la chance de l’insertion», conclut Me Hassan.
Le voleur d’Oasis va chèrement payer ses gorgées de soda: 12 mois de prison dont trois ferme et une mise à l’épreuve de deux ans. La peine de prison avec sursis de sa précédente condamnation n’est pas révoquée. Le juge d’application des peines devra décider si le jeune purge effectivement sa peine où si elle est aménagée.
«C’est une peine qui veut dire quelque chose», indique le président. «Quand on est condamné, on ne commet pas de nouveaux délits.» Manifestement, même quand on a faim.
RR
Le Journal de Mayotte
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