Les chiffres donnés par le président Zaïdani dans son document sur l’orientation budgétaire du département en 2015 ne sont pas bons. Ils étaient soumis à l’examen du CESEM, le conseil économique, social et environnemental. Les récents recrutements et la morosité des recettes en sont la cause.
Les rumeurs de recrutements massifs à l’approche des élections font craindre le pire pour le budget du département. On attend donc avec impatience le débat d’orientation budgétaire qui va se tenir entre les conseillers généraux lors de la Séance plénière du 9 mars.
Mais le rapport qui concerne le débat qui oriente la politique du département pour l’année inquiète déjà. Il est signé de la main de Daniel Zaïdani, le président du Conseil général qui avertit que « ce ne sera pas sans difficultés que le Département parviendra à équilibrer l’exercice budgétaire 2015 ».
Un document « didactique », comme le résumera pudiquement Abdou Dahalani, le président du Conseil Economique, social et environnemental de Mayotte (CESEM) qui l’a reçu ce mercredi, pour rendre un avis avant ce lundi. Ses membres l’ont malgré tout épluché ce jeudi, et, pour la troisième année consécutive portent le même avis : « le Débat d’orientation budgétaire ne donne justement pas d’orientations sur les grandes masses financières à affecter aux politiques visées ».
Elle sont au nombre de 5 telles que les énumère le président du Conseil général : la professionnalisation de l’administration générale par la formation des agents, le développement économique par l’aide aux investissements en faveur des entreprises, assurer pleinement le rôle de chef de file de l’action sociale, mettre en œuvre une politique en faveur de la jeunesse et travailler à l’aménagement du territoire.
A chacun sa littérature
S’il ne s’agissait d’un document de projection de la politique du département, on pourrait presque croire à une propagande électorale. En effet, la plupart des thèmes ont déjà été abordés en début de mandat, le rapport Mensia commandé en 2011 commandant d’alléger la masse salariale et de la professionnaliser, doublé d’un audit de l’Europe : « il y a eu une grande littérature depuis 2009 sur ces sujets, mais peu d’engagements concrets », résumait Abdou Dahalani.
Pour s’atteler aux cinq objectifs voulus par Daniel Zaïdani, le CESE appelle depuis plusieurs années à la création d’une conférence des exécutifs locaux, rassemblant l’ensemble des élus, du département, des mairies etc., « pour constituer une force de proposition face à leurs interlocuteurs régionaux et nationaux ».
Un cadre du service des finances de la collectivité dressait le tableau réaliste mais inquiétant de l’avenir du budget de la collectivité.
Inquiétant par le manque de levier sur les recettes dont dispose désormais le département : « alors que les rentrées se faisaient par les taxes de douane, les impôts sur le revenu, ceux sur les sociétés, avec la bonne surprise de l’excédent de 28 millions d’euros en 2013, elles seront désormais fixes et constituées à 60% de dotations d’Etat, dans un contexte d’austérité, donc sans espoir de progression. » Les recettes de fonctionnement baissent d’ailleurs de 305 millions d’euros en 2013 à 236 millions d’euros en 2014.
Progression de la masse salariale de 8% en un an
Même les enfants qui jouent « à la marchande » savent cela : s’il n’est pas possible d’agir sur les recettes, il faut se tourner vers les dépenses. Daniel Zaïdani le souligne, il faut baisser les dépenses de fonctionnement, « notamment à travers la réduction des effectifs » ce qui va à l’encontre de la politique de recrutement actuelle, puisque, toujours selon le président, « la masse salariale progresse de 8% entre 2013 et 2014 ».
Le non-remplacement des départs à la retraite n’a pas été tenu, sans compter que la nouvelle gouvernance issue des urnes voudra mettre en place ses équipes. Autre poste à souffrir du vent de folie pré-électoral, les subventions aux associations et organismes divers.
Les finances s’étaient pourtant redressées, et il serait dommage de revenir au point de départ, si ce n’est déjà fait. Surtout que le contexte est différent cette fois : il faut dégager une capacité d’épargne pour participer aux financements des projets européens. Or, le taux d’épargne qui était de 21% en 2013 « risque de se dégrader en 2014 et pour les années à venir », toujours selon Daniel Zaïdani, « conséquence de la baisse des recettes de fonctionnement et si maintien des dépenses de fonctionnement au même niveau ».
Le taux d’endettement est de 6% des recettes, « une zone verte », mais qui nécessiterait pour y rester de dégager de l’épargne.
Un bon diagnostic donc d’un président toujours aux manettes… Le CESE, bien que découragé par l’absence de prise en compte des préconisations passées, encourage toute volonté visant à redresser la situation d’un territoire où le défi majeur « reste la compétitivité de ses entreprises et de son système de cohésion sociale ».
Le risque de voir un budget repasser par la Cour des comptes avec tutelle préfectorale est grand.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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